Gouvernement al-Soudani

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Gouvernement al-Soudani

République d'Irak

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Le gouvernement al-Soudani lors de sa première réunion le 28 octobre 2022.
Président Abdel Latif Rachid
Premier ministre Mohammed Chia al-Soudani
Élection 10 octobre 2021
Législature 5e
Formation
Durée 1 an, 6 mois et 9 jours
Composition initiale
Coalition Alliance pour la souveraineté (Alliance Azem - TAK) - Coalition de l'État de droit (Dawa) - PDK - Alliance Fatah (Parti de la vertu islamique - SCIRI - AAH) - UPK - Mouvement Ataa (en) - Mouvement Babylone
Représentation
Conseil des représentants
189  /  329
Drapeau de l'Irak

Le gouvernement al-Soudani est le gouvernement de la République d'Irak depuis le 27 octobre 2022. Il est dirigé par l'homme politique chiite Mohammed Chia al-Soudani, du parti islamique Dawa.

Contexte[modifier | modifier le code]

Lors des élections législatives irakiennes de 2021, des groupes militants pro-iraniens contestent les résultats. Bien que les élections se soient déroulées sans incidents, le taux de participation est bas, près de 60 % des inscrits s'étant abstenus[1].

Arrivé en tête, le Mouvement sadriste dirigé par Moqtada al-Sadr est le grand vainqueur des élections, et devrait être amené à former un gouvernement de coalition. Allié au Parti démocratique du Kurdistan de Massoud Barzani et au Parti du progrès de Mohammed al-Halboussi (en) ainsi qu'à la plupart des formations sunnites irakiennes, al-Sadr soutient la candidature d'Hoshyar Zebari à l'élection présidentielle de février 2022 afin de se voir confier la formation du nouveau gouvernement, dans le but affiché de rompre avec les formations liées au voisin chiite iranien[2],[3].

Crise politique[modifier | modifier le code]

Affrontements[modifier | modifier le code]

En novembre 2021, en conséquence du résultat des élections législatives d'octobre, des affrontements surviennent à Bagdad. Les manifestants sont pour la plupart liés aux partis pro-iraniens, notamment Dawa. Les affrontements ont fait 125 blessés et deux morts. 21 manifestants ont été blessés par inhalation de fumée et neuf policiers ont été blessés par des jets de pierres.

Le 7 novembre, deux jours après, a lieu une tentative d'assassinat envers le Premier ministre Moustafa al-Kazimi, les forces armées informant que le Premier ministre avait survécu à une attaque d'un drone chargé d'explosifs vers sa résidence.

La tentative d'assassinat serait lié aux mouvements et forces ayant provoquées les manifestations et affrontements deux jours auparavant.

Premiers moments du Parlement[modifier | modifier le code]

Le 18 novembre, Moqtada al-Sadr, ayant remporté les législatives avec le Mouvement sadriste, a déclaré qu'il souhaitait former un gouvernement majoritaire.

Le 9 janvier, le Conseil des représentants nouvellement élu s'est réuni pour la première fois dans la Zone verte pour élire le président et les deux-vice présidents. La première session est chaotique, au cours de laquelle le président par intérim Mahmoud al-Mashahadani est tombé malade et a été transporté à l'hôpital[4].

Cependant, après cet évènement, le législateur sunnite et actuel président du parlement Mohammed al-Halboussi (en) a été réélu pour un second mandat[5], avec Shakhawan Abdulla (PDK) et Hakim al-Zamili (Mouvement sadriste) à la vice-présidence[6]. Les trois partis ont réussi à se faire élire à ces fonctions grâce aux candidats de chaque bloc en votant les uns pour les autres[6].

Impasse politique[modifier | modifier le code]

La formation d'un gouvernement est subordonnée à l'élection d'un nouveau président de la République. La première réunion du Conseil des représentants le en vue du premier tour de l'élection présidentielle irakienne de 2022 est un échec. Seuls 58 députés sur 329 étant présents, le scrutin n'a pas lieu faute de quorum des deux tiers des membres, et le scrutin est reporté à une date indéterminée[7],[8],[3].

Les trois principaux partis issus des élections législatives d'octobre — le Mouvement sadriste, le Parti démocratique du Kurdistan et le Parti du progrès — décident en effet de boycotter la séance, en raison des désaccords en cours sur la désignation d'un nouveau Premier ministre, ainsi qu'en protestation de la suspension de la candidature d'Hoshyar Zebari[9],[10].

Le 13 juin, les 73 députés sadristes démissionnent du Parlement[11]. Ils sont remplacés par les candidats arrivés deuxièmes dans leurs circonscription[12].

Le , lors d'une réunion au domicile de l'influent Houmam Hammoudi (en), Hadi al-Ameri et Nouri al-Maliki, jugés trop sectaires, sont écartés de la liste des candidats potentiels au poste de Premier ministre de la coalition chiite (ar). Cela a pour effet de provoquer un changement de paradigme au sein de la coalition, qui n'entend désormais plus favoriser le candidat le plus populaire (qui aurait été désigné à la majorité comme le préconisait al-Maliki) mais le plus consensuel (désigné à l'unanimité comme le préconise al-Abadi)[13]. Les cinq candidats restants après l'éviction d'al-Ameri et d'al-Maliki sont Ali al-Choukri (ar) (ministre du Plan de 2011 à 2014), Qassem al-Araji (en) (ministre de l'Intérieur de 2017 à 2018), Haïder al-Abadi (Premier ministre de 2014 à 2018), Abdel Hussein Abtane (en) (ministre des Sports de 2014 à 2018) et Mohammed Chia al-Soudani (ministre des Affaires sociales de 2014 à 2018)[14], qui est finalement choisi à l'unanimité[15]. La nouvelle est annoncée le , provoquant la colère des sadristes, qui jugent al-Soudani beaucoup trop proche d'al-Maliki. En signe de protestation, les sadristes envahissent le parlement irakien à deux reprises : une première fois le et une seconde le . La seconde invasion, qui débouche sur un sit-in, coïncide avec le début du mois de mouharram et les préparations du deuil de l'achoura observé par les chiites[16],[17],[18],[19]. Le , Saleh Mohamed al-Iraqi, un proche de Moqtada al-Sadr, demande aux protestataires d'évacuer le parlement et de réorganiser le sit-in devant et autour de celui-ci « dans un délai maximum de 72 heures »[20]. Face à l'impasse, Moqtada al-Sadr annonce son « retrait définitif » de la vie politique le , provoquant de nouvelles émeutes, qui dégénèrent cette-fois en affrontements avec les milices pro-iraniennes et les forces de sécurité (en) qui tentent de s'interposer[21]. Les violences ne durent qu'un peu plus de 24 heures (avant que les partisans sadristes ne se retirent à la demande de leur chef) mais leur bilan humain est particulièrement lourd avec plusieurs dizaines de morts et plusieurs centaines de blessés[22],[23].

Historique[modifier | modifier le code]

Formation[modifier | modifier le code]

Le , Mohammed Chia al-Soudani est chargé par le président élu Abdel Latif Rachid de former un nouveau gouvernement. Le même jour, Moqtada al-Sadr, dirigeant du Mouvement sadriste, annonce ne pas souhaiter rejoindre le nouveau gouvernement[24].

Le , le Premier ministre désigné Mohammed Chia al-Soudani est officiellement nommé dans ses fonctions, obtenant la confiance du parlement[25]. Néanmoins seulement 21 ministres sur 23 sont nommés, les portefeuilles de la Construction et de l'Environnement posant toujours des problèmes au sein de la coalition.

Au sein de la coalition, se trouve différentes alliances islamistes, la Coalition de l'État de droit, avec le Parti islamique Dawa, mais également l'Alliance Fatah, qui intègre le Parti de la vertu islamique, l'Alliance Azem et l'Alliance de la victoire, puis avec les partis du Parti démocratique du Kurdistan, l'Union patriotique du Kurdistan et le Mouvement Babylone.

La formation du gouvernement s'achève le avec les votes de confiance du parlement en faveur de Bangen Rekani (en) et Nizar Amedi (ar), qui deviennent respectivement ministres de la Construction et de l'Environnement[26].

Démissions[modifier | modifier le code]

Le , les ministres du Plan, de l'Industrie et de la Culture, tous issus du Parti du progrès, présentent leur démission pour protester contre la destitution du président du parlement (Mohammed al-Halboussi (en), également membre du Parti du progrès) par la cour suprême, qu'ils perçoivent comme « une violation flagrante de la Constitution »[27]. Le , le porte-parole du gouvernement, Bassem al-Awadi, annonce que le Premier ministre refusent ces démissions[28].

Composition[modifier | modifier le code]

Fonction Titulaire Parti
Premier ministre Mohammed Chia al-Soudani Dawa
Vice-Premier ministre
Ministre des Affaires étrangères
Fouad Hussein PDK
Vice-Premier ministre
Ministre du Pétrole
Hayan Abdel-Ghani (ar) Coalition de l'État de droit
Vice-Premier ministre
Ministre du Plan
Mohammed Ali Tamim (ar) TAK
Ministre de l'Intérieur Abdel Amir al-Chammari (ar) Indép.
Ministre des Finances Taif Sami Mohammed Indép.
Ministre de la Défense Thabet al-Abbassi (ar) Alliance Azem
Ministre de l'Éducation Ibrahim Namis al-Jubouri (ar) Alliance Azem
Ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique Naïm al-Aboudi (ar) AAH
Ministre des Télécommunications Hiam al-Yassiri (ar) Mouvement Ataa (en)
Ministre de la Construction et du Logement Bangen Rekani (en) PDK
Ministre de l'Industrie et des minéraux Khaled Battal (ar) TAK
Ministre de la Santé Saleh al-Hasnaoui (en) Coalition de l'État de droit
Ministre de l'Environnement Nizar Amedi (ar) UPK
Ministre de la Jeunesse et des Sports Ahmed al-Mubarqa (ar) Coalition de l'État de droit
Ministre du Travail et des Affaires sociales Ahmed al-Assadi (en) Alliance Fatah
Ministre de l'Électricité Ziad Fadel (ar) Parti de la vertu islamique
Ministre des Ressources en eau Aoun Diab (ar) Indép.
Ministre des Transports Razzaq al-Saadawi (ar) Alliance Fatah
Ministre de la Justice Khaled Chouani (ar) UPK
Ministre de la Culture Ahmed Fakak al-Badrani (ar) TAK
Ministre de l'Agriculture Abbas al-Alaoui (ar) Coalition de l'État de droit
Ministre du Commerce Atheer Daoud Al-Ghurairy Alliance Azem
Ministre de l'Intégration et du Déplacement Evan Faeq Yakoub Jabro (ar) Mouvement Babylone

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. (en) Mina Al-Oraibi, « The Biggest Loser of Iraq’s Election Could Be Iran », sur Foreign Policy, .
  2. « Présidentielle en Irak : les divisions politiques reflètent la "fracture globale du pays" », sur France 24, FRANCE24, (consulté le ).
  3. a et b (en) Reuters, « Iraq parliament fails to elect new president - lawmakers », sur Reuters, (consulté le ).
  4. (en) « Iraqi parliament holds first session, elects speaker », sur devdiscourse.com, .
  5. (en) « Halbousi re-elected speaker of parliament during chaotic first session », sur rudaw.net, .
  6. a et b (en) « KDP puts forth candidate for deputy parliament speaker », sur rudaw.net, .
  7. « En Irak, report de la présidentielle pour cause de boycott au Parlement », sur France 24, FRANCE24, (consulté le ).
  8. (en) « Iraq presidential vote in doubt after boycotts, candidate suspension », sur France 24, FRANCE24.English, (consulté le ).
  9. (so) « Why Iraqi lawmakers failed to elect a new president », sur www.aljazeera.com (consulté le ).
  10. « Irak : l'élection du président par le Parlement reportée sine die, faute de quorum », sur RTBF (consulté le ).
  11. https://www.facebook.com/FRANCE24, « Irak : démission des députés du bloc sadriste, la plus grande force politique au Parlement », sur France 24, FRANCE24, (consulté le ).
  12. Associated Press, « Iraq Parliament Swears in New Members After Walkout of 73 », sur VOA (consulté le )
  13. (ar) « "تسريبات المالكي" تعقِّد اختيار رئيس الوزراء في العراق » [« Les « fuites d'al-Maliki » compliquent le choix d'un Premier ministre en Irak »], sur Asharq News (en),‎ (consulté le )
  14. (ar) « قيادي بالإطار: مرشحو رئاسة الوزراء هم العبادي، شياع السوداني، عبد الحسين عبطان، علي الشكري، قاسم الأعرجي » [« Chefs du cadre : Les candidats au poste de Premier ministre sont al-Abadi, Chia al-Soudani, Abdel Hussein Abtane, Ali al-Choukri et Qassem al-Araji »], sur awla.news,‎ (consulté le )
  15. « Irak : la coalition chiite choisit son candidat pour le poste de premier ministre », Le Figaro, (consulté le )
  16. Samya Kullab et Qassim Abdul-Zahra, « What’s behind the storming of Iraq’s parliament? », PBS, (consulté le )
  17. « En Irak, les partisans de Moqtada al-Sadr occupent le Parlement "jusqu'à nouvel ordre" », France 24, (consulté le )
  18. (ar) « اعتصام مفتوح لأنصار التيار الصدري داخل البرلمان العراقي » [« Un sit-in des partisans du mouvement sadriste au parlement irakien »], Al-Arabiya,‎ (consulté le )
  19. (en) « Iraq’s al-Sadr demands dissolution of parliament, early elections », Al Jazeera, (consulté le )
  20. (ar) « الصدر يطالب أنصاره بالتحول للاعتصام حول البرلمان العراقي والكاظمي يدعو لحوار شامل » [« Al-Sadr appelle ses partisans à organiser un sit-in autour du parlement irakien et al-Kazimi appelle à un dialogue global »], Al Jazeera,‎ (consulté le )
  21. Guillaume Decamme, « Reprise des combats à Bagdad, au moins 23 morts », La DH Les Sports+, (consulté le )
  22. Belga et Kevin D., « Irak : le calme est revenu à Bagdad, mais une solution politique au retrait de Moqtada Sadr est encore loin », Radio-télévision belge de la Communauté française, (consulté le )
  23. Hussameldin Abdelgadir Salih Mohamed, « L'appel au calme de Moqtada al-Sadr salué en Irak et à l’international », Agence Anadolu, (consulté le )
  24. (en) « Sadr Movement decides to boycott PM-designate Sudani’s cabinet », sur rudaw.net, .
  25. (en) « Iraqi parliament approves premiership of Mohammed Shia al-Sudani », sur freemalaysiatoday.com, .
  26. (ar) « اكتمال الحكومة العراقية بعد حصول وزيرين جديدين على ثقة البرلمان » [« Le gouvernement irakien est formé après que deux nouveaux ministres aient obtenu la confiance du Parlement »], Xinhua,‎ (consulté le )
  27. « Irak: trois ministres démissionnent après le limogeage de l'influent président du Parlement », RFI, (consulté le )
  28. (ar) « السوداني يرفض استقالات ثلاثة وزراء إثر إقالة الحلبوسي » [« Al-Soudani rejette les démissions de trois ministres suite au limogeage d'al-Halboussi »], sur Independent Arabia (ar),‎ (consulté le )