Discussion:Communauté européenne de défense

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CED, sigle de Communauté européenne de défense, une organisation conclue entre la France, l'Allemagne fédérale, l'Italie, les Pays-Bas, la Belgique et le Luxembourg. L'adoption d'une question préalable par l'Assemblée nationale française en 1954 a entraîné le rejet de ce projet. L'opinion française était profondément divisée. Pour: le MRP, les indépendants, la moitié des socialistes, une partie des radicaux. Contre: de Gaulle, les gaullistes, les communistes, une partie des socialsite et des radicaux).

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Fenêtre sur l'Europe [1] Mercredi 12 Novembre 2008 Défense européenne : Première opération navale de l'Union européenne

Cette grande première européenne se fera contre les pirates au large de la Somalie et dans le golfe d'Aden.

Selon la décision prise par les ministres européens de la Défense, lundi 10 décembre, cette force d'action navale contre les pirates sévissant au large de la Somalie et dans le golfe d'Aden, baptisée "Eunavfor Atalanta", sera opérationnelle d'ici à la mi-décembre. Elle impliquera, dans un premier temps, des navires et avions de la France, de l'Allemagne, du Royaume-Uni et de l'Espagne.

Le commandement de la flotte navale sera assuré par le vice-amiral britannique Philip Jones. C'est la première fois que le commandement d'une opération menée dans le cadre de la politique européenne de sécurité et de défense (PESD) est assurée par la Grande-Bretagne. Dix ans après le sommet franco-britannique qui avait lancé cette politique, "c'est un beau symbole des progrès de l'Europe de la Défense et de son passage à l'âge adulte" a déclaré le ministre français de la Défense, Hervé Morin, à l'issue de la réunion de lundi. --JackAttack (d) 13 novembre 2008 à 12:51 (CET)[répondre]

Propositions pour l'article[modifier le code]

Je met ici ce texte qui a été ajouté soudainement par une IP anonyme: il a des passages intéressants et sourcés (quoiqu'imparfaitement au regard de WP:SOURCES: il faut la date et la maison d'édition, et la page - à tout au moins le chapitre - afin de s'assurer de la vérifiabilité; en particulier lorsqu'on cite une citation ou des chiffres), mais constituait une évolution abrupte de l'article ne respectant pas les standards WIKI. Ahbon? (d) 24 février 2010 à 01:30 (CET)[répondre]

Texte de la proposition[modifier le code]

Origines.


Le projet d'une défense européenne, dans le contexte de la guerre froide, est le résultat d'une exigence américaine, d'une réaction française et d'une proposition de synthèse formulée par Jean Monnet.


- L'exigence américaine :


elle résulte de l'entrée en guerre des troupes nord-coréennes en Corée du Sud, le 25 juin 1950. Les Etats-Unis, sous le drapeau des Nations-Unies envoient aussitôt des troupes pour rétablir la situation en Corée. Les Etats-Unis, et les Etats d'Europe occidentale s'inquiètent de la possibilité d'une opération similaire en Allemagne. Selon les experts militaires américains, les troupes d'occupation des Etats-Unis, de la Grande-Bretagne et de la France ne pourraient pas résister à une poussée venue de l'Est. D'autre part le pacte atlantique signé le 4 avril 1949, n'est pas encore opérationnel. Les Etats-Unis réagissent immédiatement, en envoyant des renforts et du matériel en Allemagne, mais ils exigent une participation des Allemands de l'Ouest à l'effort commun de défense, même si la RFA n'est pas membre de l'OTAN(1). La question du réarmement de l'Allemagne de l'Ouest avait été envisagée par les Etats-Unis, bien avant le début de la guerre de Corée, puisqu'en janvier 1948, le général Ridgway déclare qu'il est impossible de s'opposer à une agression russe sans la contribution de l'Allemagne (2). Cependant les Etats-Unis, avant le début de la guerre de Corée, prennent en compte le point de vue des Européens, particulièrement celui des Français, hostiles à tout réarmement de l'Allemagne. Le 8 mai 1950 (veille du « discours de l'horloge » de R.Schuman), à Paris, dans une conversation avec Robert Schuman, ministre des affaires étrangères, son homologue américain le secrétaire d'Etat, Dean Acheson, affirmait que le moment de discuter de ce réarmement n'est pas encore venu (3). Le mois suivant, avec le début de la guerre de Corée, la vision stratégique des Etats-Unis est profondément modifiée. Engagés massivement en Asie, ils ne veulent pas, dans le même temps, faire l'essentiel des efforts pour assurer la sécurité de l'Europe occidentale. Dans la mesure où les Européens doivent accroître leurs effectifs, surtout si l'Europe occidentale doit être défendue le plus à l'Est possible, près de l'Elbe, il faut un réarmement de l'Allemagne de l'Ouest, le plus rapide possible. Alors qu'en mai 1950, les Etats-Unis prenaient en compte les objections de leur allié français, en septembre 1950, ils exigent un réarmement rapide de l'Allemagne. A l'occasion d'une réunion de l'OTAN à New York du 10 au 16 septembre 1950, Dean Acheson, secrétaire au département d'Etat exprime clairement la volonté américaine : « je veux des Allemands en uniforme pour l'automne 1951 » (4). Pour les Etats-Unis, l'heure n'est plus à l'attentisme, Washington envisage alors de faire entrer 10 ou 12 divisions allemandes dans l'organisation du Pacte atlantique, en cours de formation. La majorité des 12 ministres des affaires étrangères de pays membres de l'OTAN, se rallie à la proposition américaine. Le Chancelier de la RFA, K.Adenauer, avait pris position en faveur du réarmement de la RFA : dans un mémorandum adressé aux trois puissances occupantes (EU,GB,Fr), le 29 août 1950, il demande le renforcement des troupes alliés stationnées en RFA, et surtout la création d'une armée européenne avec participation allemande(5).


- La réaction française :


à New-York, dans un premier temps, le 12 septembre 1950, le ministre français des affaires étrangères, s'oppose à la proposition américaine de réarmement de l'Allemagne. Dean Acheson, appuyé par son homologue anglais Bevin, reprennent, les 13 et 14 septembre, la discussion avec Schuman, pour que la France renonce à son refus de principe d'un réarmement allemand. Les pressions américaines et anglaises sont d'autant plus fortes, qu'au sein du conseil des ministres de l' alliance atlantique, seuls la Belgique et le Luxembourg soutiennent la position de la France. Finalement le 16 septembre, Schuman accepte le principe d'un réarmement de l'Allemagne à certaines conditions. Les forces allemandes devaient être versées dans une organisation déjà existante de façon à être solidement encadrées . L'idée d'une participation allemande était acceptée, mais R.Schuman ne pouvait prendre une décision prématurée sur ce problème (6). En quatre jours, la France était donc passée d'un refus du réarmement de l'Allemagne, à l'acceptation d'une discussion sur les conditions et le calendrier d'un réarmement de l'Allemagne. Washington pressée d'arriver à un accord, pousse la France à prendre une initiative pour proposer une solution, avant la prochaine réunion de l'alliance atlantique, prévue le 28 octobre 1950.


- Proposition de synthèse de Jean Monnet :


le 16 septembre 1950, le jour où Schuman cède aux exigences américaines, J. Monnet, lui adresse une lettre, où il admet lui aussi le réarmement de la RFA, non pas sur une base nationale, qui lui redonnerait sa pleine souveraineté, mais dans un cadre européen supranational, une sorte de plan Schuman élargi (7). J.Monnet fait un double constat. D'une part, il négocie depuis le 20 juin 1950, le traité qui doit mettre en oeuvre le plan Schuman (CECA). Il craint donc, qu 'une Allemagne réarmée et pleinement souveraine, ne devienne réticente à s'intégrer dans une communauté européenne encore en gestation. D'autre part, J.Monnet, avait constaté que les Etats-Unis avaient approuvé le projet d'une communauté européenne du charbon et de l'acier. Il en déduit donc qu'une formule européenne de réarmement serait à la fois bien accueillie par les Etats-Unis, et surtout permettrait de franchir une étape décisive vers l'unité européenne, qui ne pouvait pas se faire sans une réconciliation définitive entre Allemands et Français. Peu familier et connaisseur des questions militaires, J.Monnet voit surtout dans l'armée européenne le moyen d'accélérer l'intégration européenne. Dans l'esprit de J.Monnet, la CECA et la CED (communauté européenne de défense) sont structurellement complémentaires, dans la perspective de fondation d'un futur Etat européen. Le projet de CED sera donc pour J.Monnet, une transposition de la technique du plan Schuman (charbon et acier) au domaine militaire. Une nouvelle expérimentation de ce « fédéralisme partiel », qui est en voie de réussir en matière de charbon et d'acier(8). J.Monnet, aidé par quelques hommes qui travaillent avec lui à la mise en oeuvre du plan Schuman : Hirsch, Uri, Reuter, Clappier et Alphand, rédigent le projet d'une armée européenne, qu'il communique au président du conseil René Pleven (9). Adpoté en conseil des ministres, le 8 octobre 1950, ce qui désormais s'appelle « plan Pleven » est en fait, un projet conçu et écrit par J.Monnet.


Elaboration du projet.


-Le projet initial:


Dans une déclaration devant l' Assemblée nationale, le 24 octobre 1950, R.Pleven dévoile le projet conçu et écrit par J.Monnet : « création pour la défense commune, d'une armée européenne rattachée à des institutions politiques de l'Europe unie, placée sous la responsabilité d'un ministre européen de la défense, sous le contrôle d'une assemblée européenne, avec un budget militaire commun. Les contingents fournis par les pays participants seraient incorporés dans l'armée européenne, au niveau de l'unité la plus petite possible ». L' Assemblée nationale approuve la déclaration de Pleven à une large majorité, car l'incorporation de soldats allemands dans l'armée européenne « au niveau de l'unité la plus petite possible », empêcherait la RFA de recréer une armée et un état-major. En effet cette armée comprendrait des divisions européennes, au sein desquelles les unités nationales seraient intégrées au niveau le plus bas possible, au niveau du bataillon de 800 à 1000 hommes, afin de disperser au maximum les contingents allemands et les dissoudre dans cette armée européenne. Cette armée européenne serait intégrée dans le dispositif militaire de l'OTAN, sans remettre en cause la prééminence des Etats-Unis. Il n'était donc pas du tout question de doter l'Europe occidentale d'un instrument de défense indépendant. Au contraire, l'armée européenne dépendrait du commandement atlantique, c'est à dire des Etats-Unis(10). R.Pleven reçut chez lui, à St Brieuc, J.Moch, ministre de la défense. Celui-ci venait rendre compte au chef du gouvernement d'une réunion tripartite (Etats-Unis, Angleterre et France). R.Pleven, au cours de cette rencontre de St Brieuc, admit la dépendance vis à vis des Etats-Unis : « cette armée européenne sera placée sous les ordres du commandement supérieur des forces atlantiques en Europe ». Ce projet initial a cependant deux défauts majeurs aux yeux des Américains d'une part, et des Allemands d'autre part. -Il ne convient pas aux Etats-Unis, car la mise en oeuvre d'une armée européenne est retardée par la constitution préalable de structures politiques communautaires, à commencer par celles de la CECA. Marshall, secrétaire d'Etat à la défense, dénonce donc le dispositif imaginé par J.Monnet, lors du comité de défense du Pacte atlantique du 27 au 31 octobre 1950. Alors que J.Bloch, ministre de la défense, expose le plan Pleven, Marshall demande l'ajournement de toutes les décisions prévues sur l'intégration des forces alliés en Europe, tant qu'on ne serait pas d'accord sur le réarmement de l'Allemagne. La majorité des partenaires de la France dans l'OTAN s'alignent derrière la critique américaine. Ils considèrent le plan Pleven comme une manoeuvre pour gagner du temps. Une nouvelle fois, seuls la Belgique et le Luxembourg, eux aussi soucieux d'empêcher la reconstitution d'une armée allemande, soutiennent la France au conseil atlantique (11). Le communiqué final du comité de défense de Pacte atlantique, le 31 octobre 1950, précise de nouveau clairement l'exigence américaine : « la nécessité de réarmer l'Allemagne de l'Ouest dans le cadre du pacte atlantique ». -Le plan Pleven inquiète et divise les Allemands. Le chancelier Adenauer, après un mois d'hésitation, soutient le projet, mais il se heurte à une virulente opposition des socialistes, qui craignent que cette intégration militaire de la RFA, ne compromette définitivement les perspectives de réunification. Opposition d'autant plus forte, que le 3 novembre 1950, l'URSS fait une proposition de désarmement et d'évacuation des troupes étrangères des deux Allemagnes, qui seraient invitées à se prononcer sur leur possible réunification. Autre inquiétude allemande, les dispositions discriminatoires envisagées par le projet français à l'égard du statut militaire de la RFA. Adenauer, le 8 novembre 1950, dans une déclaration au Bundestag, soutient le plan Pleven, mais à certaines conditions : « si la République fédérale doit y participer, elle doit avoir les mêmes devoirs mais aussi les mêmes droits que les autres pays ». Face aux exigences imposées par les Américains et aux conditions posées par les Allemands, le projet initial, le plan Pleven, doit donc être complètement rediscuté.


-Du projet au traité :


Le traité instituant une CED n'est signé que le 27 mai 1952 à Paris, par la France, la RFA, l'Italie, la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg, soit 19 mois après la présentation du plan Pleven en conseil des ministres, le 8 octobre 1950. La longue et laborieuse gestation du traité se déroule en deux étapes (12). -De décembre 1950 au 24 juillet 1951 : l'élaboration du rapport intermédiaire. Ce rapport intermédiaire, première version amendée du projet Pleven, est le résultat en juin-juillet 1951, d'un rapprochement des positions française et américaine. D'une part Les socialistes français, dont J.Moch, ministre de la défense, quittent le gouvernement. J.Moch était dans le gouvernement français, l'un des plus farouches opposants au réarmement de l'Allemagne (13). D'autre part, le général Eisenhower, commandant en chef des forces de l'OTAN, à la suite d'une entrevue avec J.Monnet, le 27 juin 1951, se montre sensible à l'argument politique de la réconciliation franco-allemand en Europe. Les Américains se rallient au projet de Monnet, si il est profondément amendé, notamment pour tenir compte des revendications allemandes « réarmer les Allemands, sans effrayer les Français ». Le rapport intermédiaire du 24 juillet 1951, acceptés par les Etats-Unis, la France et la RFA, pose les bases du système institutionnel de ce que l'on appelle désormais officiellement la communauté européenne de défense (14). -Du 24 juillet 1951 au 27 mai 1952 : l'adoption du texte défnitif. A partir de l'accord intermédiaire du 24 juillet 1951, un projet de traité est rédigé et publié, le 1 er février 1952. Il ne sera signé, à Paris, que le 27 mai 1952. Entre temps, il est approuvé par le conseil atlantique de Lisbonne et par le parlement des 6 pays, déjà membre de la CECA. En France, l'Assemblée nationale adopta le 19 février 1952 le principe de la CED, à la demande du gouvernement présidé par E.Faure. Le traité instituant la CED, signé le 27 mai 1952, diffère profondément du plan Pleven sur 4 points fondamentaux : 1-Fin du statut d'occupation de la RFA, l'Allemagne de l'Ouest recouvrera sa plein souveraineté avec l'entrée en vigueur de la CED. 2-Au sein de la CED, même si elles sont limitées à 12, il existera bien des divisions allemandes, dans cette armée, qui comporterait 40 divisions nationales de 13.000 hommes portant un uniforme commun. La CED disposerait donc d'une armée intégrée sous commandement commun, sans discrimination entre pays membres, comprenant toutes leurs forces terrestres et aériennes, à l'exception de celles nécessaires à la défense des territoires d'outre-mer. Cette disposition était importante pour la Belgique et surtout pour la France, alors en guerre en Indochine. Permettre à l'Allemagne d'avoir 12 divisions, c'était en fait accepter l'exigence des Etats-Unis, formulée ainsi, dès le mois de septembre 1950. Les pressions américaines ont eu raison des conditions françaises. La France a du accepter, des unités de base beaucoup plus importantes que prévu dans le plan Pleven. Par contre, cette armée européenne, comme le prévoyait déjà le plan Pleven, reste sous commandement de l'OTAN. 3-Abandon de l'idée d'un ministre européen de la défense, le lieu de décision de la CED sera donc le conseil des ministres dans lequel chaque pays membre sera représenté par son ministre de la défense, y compris la RFA. L'Allemagne obtient donc l'égalité de droit au sein de la CED. 4-Les institutions de la CED, telles qu'elles sont définies dans le traité signé le 27 mai 1952, ne sont pas celles voulues par J.Monnet. Elles étaient moins supranationales que celles prévues dans le plan Pleven, dans la mesure où le véritable organe décisionnel de la CED,le conseil des ministres, était un lieu de coordination et de décision entre Etats, mais absolument pas une instance fédérale, indépendante des Etats, comme l'était la haute autorité de la CECA. De plus, le conseil de ministres se prononcerait à l'unanimité pour toutes les questions importantes, ce qui préservait la souveraineté de chaque Etat. Les questions de moindre importance seraient tranchées à la majorité des deux tiers, avec pondération des voix selon les effectifs des différents pays membres. Pour faire appliquer les décisions prises par le conseil des ministres, il était prévu de mettre en place un commissariat collégial de 9 membres (2 pour la France, l'Allemagne et l'Italie et 1 pour la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg). Le commissariat de la CED aurait pu être l'équivalent de la Haute autorité de la CECA, à la différence que la Haute autorité était l'organe fédéral de décision de la CECA, alors que dans la CED, le pouvoir de décision était donné à une institution unioniste : la conseil de ministres. Les deux autres institutions de la CED, la cour de justice et l'assemblée consultative étaient identiques à celles de la CECA. Il n'existerait en réalité qu'une cour de justice, celle déjà existante de la CECA, qui serait également compétente pour la CED. La seule différence est que l'assemblée de la CED comportera 9 membres de plus que l'assemblée de la CECA, pour donner 3 délégués supplémentaires à la France, l'Allemagne et l'Italie.


Ratifications.


-La querelle de la CED :


-La « querelle de la CED » ne débute vraiment en France, qu'après la signature du traité de Paris, le 27 mai 1952, et son dépôt pour ratification à l'Assemblée nationale. L'opinion publique et les parlementaires se divisent en deux camps, les cédistes et les anticédistes, à l'image de ce que la France avait connu avec l'affaire Dreyfus (15). La référence à l'affaire Dreyfus reviendra d'ailleurs très souvent entre l'été 1952 et l'été 1954. Dès lors tous les chefs de gouvernement (Pinay, Mayer et Laniel) vont remettre au lendemain une ratification risquée. A partir du 10 septembre, il est aisé pour chacun de ces président du conseil de trouver une excuse pour suspendre le processus de ratification. En effet, à partir du 10 septembre 1952, l'assemblée de la CECA, présidée par P-H Spaak, se transforme en assemblée ah hoc chargée de préparer et soumettre aux chefs de gouvernement un projet de CPE (communauté politique européenne), censée être l'instance politique encadrant la CECA et la CED. -D'autre part, parmi les partis politiques français, seul le MRP, présidé par R.Schuman, est presque unanimement favorable à la CED. Cependant, même au MRP, il existe des anticédistes : Léo Hamon, l'abbé Pierre, Charles d' Aragon et Robert Buron. Les communistes et les gaullistes sont radicalement opposés à la CED, quant aux radicaux et aux socialistes, ils sont profondément divisés. Des figures historiques du mouvement radical , E.Herriot ou E.Daladier, ou des personnalités socialistes, J.Moch, D.Mayer, V.Auriol (président de la République), s'opposent à la CED. La « querelle de la CED » est au coeur des scrutins pour l'élection à la présidence de la République, en décembre 1953. Le candidat finalement élu pour succéder à V.Auriol, après 12 tours de scrutin, R.Coty, n'a pas pris position dans le débat sur la CED.


-L'échec de la ratification du traité:


-A partir de mars 1953, avec la mort de Staline, puis la fin de la guerre de Corée et l'aube de la coexistence pacifique de N.Khrouchtchev, les cédistes vont être privés de leur principal argument : le danger communiste. Par contre de Gaulle, qui s'investit complètement dans la campagne anticédiste au début de l'année 1953, les communistes et l'ensemble des anticédistes, face aux pressions du nouveau président des EU, Eisenhower et de son secrétaire d'Etat J Foster Dulles, peuvent facilement développer l'argument de l'abaissement de la France dans l'atlantisme. J Foster Dulles fait pression sur la France en laissant planer la menace d'une révision des aides américaines en cas de refus français de la CED. Cette intervention directe des Etats-Unis soude le bloc anticédiste, et permet à de Gaulle d'aiguiser certains des aspects de sa future politique extérieure d'indépendance nationale. Aux menaces américaines, il répond : «  quand M. F.Dulles évoquait à Paris le fantôme d'une révision dramatique de la politique américaine à l'égard de la France, son amie et son alliée, je suis persuadé qu'il ne pouvait pas réprimer un sourire. Avec le même sourire, je lui réponds aujourd 'hui : ne vous gênez pas, cher ami". Face à l' argumentation anticommuniste des cédistes, qui perdait de son efficacité à partir de 1953, un large front anti-atlantiste se constitua. Ce front anticédiste gagne même des neutralistes. Ainsi le journal « le monde » devint ouvertement anticédiste (16), par rejet de la logique anticommuniste et antisoviétique des cédistes. La primauté de l'impératif anticommuniste, qui servait de point d'accroche à toute l'argumentation cédiste, est contestée par un nombre de plus en plus important de socialistes, radicaux et de gaullistes. Exemple révélateur de cette évolution, cet extrait d'un article paru dans le revue gaulliste « Rassemblement », le 22 avril 1954  : « il est une sorte de peur qui rend fous quelques thuriféraires de l'armée européenne : la peur du communisme. Ce n'est pas ici qu'on minimisera le péril communiste. Le danger, quoique moins immédiat, reste immense. Mais il importe de ne pas précipiter délibérément la France sous le joug allemand et américain, avec le mauvais prétexte, qu'à Bonn et à Washington on veut manger du bolchévik »(17). D'autre part, le tragique épilogue de la fin de la guerre d'Indochine, dans le première partie de l'année 1954, ne plaide pas en faveur de la CED, auprès des militaires, qui craignent une perte de souveraineté et un renoncement de la France pour ses actions d'outre-mer. Le 31 mars 1954, le maréchal Juin dénonce vivement la CED, ce qui lui vaudra des sanctions, donnant ainsi de nouveaux arguments aux anticédistes. Alors que 4 des 6 pays ratifient la CED entre mars 1953, pour la RFA, et avril 1954 au Luxembourg, la querelle entre cédistes et anticédistes s'amplifie en France, à tel point que l'Italie suspend sa ratification, en attendant le résultat de la ratification française. Face à la pression populaire, les majorités cédistes qui font les gouvernements étaient de plus en plus fragiles. Pour les trois présidents du conseil qui dirigent ces gouvernements, Pinay, Mayer et Laniel, « oublier » la ratification du traité était leur seule garantie de survie. Pierre Mendès-France, président du conseil à partir du 18 juin 1954, essaye en vain de négocier un nouveau protocole du traité de la CED. Il décide alors de « sortir le cadavre du placard », et permet enfin d'ouvrir le débat de ratification à l'Assemblée nationale, le 29 août 1954. Plusieurs commissions de l'Assemblée nationale avaient déjà émis des rapports défavorables au traité. Le président du conseil, dont le gouvernement est divisé sur la question (comme les précédents), ne pose pas la question de confiance. Le vote du 30 août 1954, écarte définitivement la CED, sans débat de fond, puisque les anticédistes proposent le vote d'une question préalable, adoptée par 319 voix contre 264. Ce rejet entraîne également l'échec du projet de communauté politique européenne, qui lui avait été associé.


Conséquences.


-L'UEO, solution au réarmement de l'Allemagne occidentale :


Après l'échec de la CED, une négociation internationale s'ouvre très vite, pour trouver une solution au réarmement et à la mise en oeuvre de la souveraineté de la RFA. Les initiatives anglaises, soutenues pas les EU s'imposent rapidement. Le ministre anglais des affaires étrangères, A.Eden, invite les 6 pays de la CECA, les Etats-Unis et le Canada à une réunion à Londres le 16 septembre 1954. Le principe d'un règlement est adopté à la conférence de Londres, qui se déroule du 26 septembre au 3 octobre 1954. La RFA est autorisée à créer une armée nationale. Elle est aussi autorisée à adhérer à l'OTAN, au même titre que les autres alliés. La France obtient certains certaines garanties : -le réarmement de l'Allemagne se fait dans le cadre de l'UEO (Union de l'Europe occidentale : 6 pays de la CECA + le Royaume-Uni) -Au sein de l'UEO était instituée l'ACA (Agence de contrôle des armements) qui avait un pouvoir de contrôle sur tous les armements des pays membres. Un second organe technique est créé, le CPA ( Comité permanent des armements), afin de développer, dans le domaine de l'armement, la coopération entre les 7 pays membres. L'ACA étaient fortement inspirée des clauses discriminatoires prévues par la première version du texte instituant la CED, dans la mesure où seule la RFA se voyait interdire la fabrication d'armes atomiques, bactériologiques et chimiques (ABC). La RFA accepte ce nouveau dispositif, car l'UEO permettait d'insérer l'Allemagne de l'Ouest dans un système de défense de l'Europe occidentale, lui-même intégré dans l'OTAN. Des textes élaborés sur la base de ce « règlement de Londres », sont signés à la conférence de Paris, le 23 octobre 1954. Ratifiés rapidement au cours de l'hiver, ils entrent en vigueur le 5 mai 1955. La solution de l'automne 1954, qui concilie une pleine reconnaissance de la RFA, moins de supranationalité dans l'organisation d'une armée européenne, une meilleure coopération du Royaume-uni et un contrôle du réarmement de l'Allemagne, donne satisfaction à tous les gouvernements d'Europe occidentale et aux Etats-Unis (18).


-L'incapacité de construire une réelle défense européenne:


L'échec de la CED, comme la solution de l'UEO, révèlent l'incapacité des Etats d'Europe occidentale de concevoir un système de défense indépendamment des Etats-Unis. R.Marjolin, qui fut l'un des principaux collaborateurs de J.Monnet le confessera dans ses mémoires : « l'incapacité de l'Europe à s'unir résulte d'une décision prise implicitement par les Européens après la fin de la seconde guerre mondiale, celle de s'en remettre aux Américains pour leur défense » (19). L'idée d'une défense européenne est relancée en 1992, par la signature du traité de Maastricht (PESC : politique étrangère et de sécurité commune), confirmée en 2007 par la signature du traité de Lisbonne, mais toujours dans le cadre de l'OTAN, c'est à dire sous une étroite dépendance de Washington.


-Comment relancer le processus de la construction européenne ?


Pour tous les européistes, il est important se surmonter l'échec de la CED. Un double consensus se dessine rapidement, afin que la construction européenne ne s'arrête pas à la CECA : -abandonner les sujets sensibles, comme l'unification militaire, et revenir à des thématiques économiques, où les succès semblent être plus à portée, comme l'avait montré l'exemple de la CECA. En 1950, J.Monnet, en transposant les mécanismes de la CECA à la CED, restait dans une vision économiste des choses, alors que la défense est au coeur de la souveraineté nationale, 5 ans seulement après la capitulation allemande. -Dès l'automne 1954, naissent de nombreux projets de relance. J.Monnet prône la poursuite d'une intégration sectorielle dans la continuité de la CECA. Le 2 décembre 1954, l'Assemblée de la CECA vote une résolution qui demande l'élargissement des compétences de la CECA aux transports et aux sources d'énergie (20). J.Monnet propose la création d'une organisation pour l'énergie atomique. Le projet Euratom est lancé, mais en même temps, J.Monnet se laisse convaincre d'associer à la poursuite d'une intégration sectorielle (Euratom),un projet de marché commun généralisé, dont l'un des principaux promoteur fut le ministre de l 'économie de RFA, L.Erhard. La « résolution de Messine », du 3 juin 1955, des six ministres des affaires étrangères des pays membres de la CECA, est le texte de base qui ouvrira les négociations du comité Spaak : « poursuivre l'établissement d'une Europe unie par le développement d'institutions communes, la fusion progressive des économies nationales, la création d'un marché commun et l'harmonisation progressive de leur politique sociale »(21).


(1). P. Gerbert : article CED in Dictionnaire historique de l'Europe unie. Ed A.Versaille.

(2). G. Elgey : la République des illusions. Paris.

(3). R.Poidevein : Robert Schuman, homme d'Etat. 1986

(4). E Du Réau : l'idée européenne au xx e siècle. Des mythes aux réalités. 2008.

(5). K.Adenauer : mémoires. Paris. T.1. 1965.

(6). P-M de la Gorce : naissance de la France moderne. T.2 : apogée et mort de la IV e République. Grasset.

(7). J.Monnet, R.Schuman : correspondance. 1947-1953. Lausanne. 1986. Le « plan Schuman », annoncé le 9 mai 1950, par le « discours de l'horloge », est une proposition française à l'Allemagne, de mettre en commun la production et le commerce du charbon et de l'acier.

(8). C.Zorgbibe : histoire de la construction européenne. PUF. 1993.

(9). P.Vial : J.Monnet, un père pour la CED, in R.Girault et G.Bossuat (Dir), Europe brisée, Europe retrouvée. 1994.

(10). V.Auriol : journal du septennat. A.Colin. 1970.

(11). JM. Sterkendries : la Belgique et la CED,in M.Dumoulin (Dir), l'échec de la CED (1954), leçons pour demain ? Actes du colloque de Louvain la Neuve.

(12). E Du Réau : op.cit.

(13). V.Auriol : op.cit.

(14). P. Mélandri : les Etats-Unis et le plan Pleven : oct 1950-juillet 1951, in Relations internationales, N°11.

(15). R.Aron et D.Lerner (Dir), la querelle de la CED. Essais et analyse sociologique. A.Colin. 1956

(16). JN.Jeanneney et J.Julliard : le monde de Beuve-Méry ou le métier d'Alceste. Seuil. 1979

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