Marie-Gabriel-Florent-Auguste de Choiseul-Gouffier

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Marie-Gabriel-Florent-Auguste de Choiseul-Gouffier
Portrait de Marie-Gabriel-Florent-Auguste, comte de Choiseul-Gouffier, peint par Louis-Léopold Boilly
Fonctions
Fauteuil 25 de l'Académie française
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Pair de France
-
Ambassadeur de France dans l'Empire ottoman
-
Fauteuil 25 de l'Académie française
-
Ministre d'État
Biographie
Naissance
Décès
Nationalité
Activités
Période d'activité
Famille
Père
Marie Gabriel Florent Christophe de Choiseul, Comte de Choiseul-Beaupré (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Enfants
Aglaé Marie Louise de Choiseul d'Aillecourt (d)
Antoine Louis Octave de Choiseul-Gouffier
Antoinette Francoise Sidonie de Choiseul (d)
Alexandrine Françoise Eugénie Zéphirine Olympe de Choiseul d'Aillecourt (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
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Marie-Gabriel-Florent-Auguste de Choiseul-Gouffier est un diplomate et écrivain français, né le à Paris et mort le à Aix-la-Chapelle, issu des Choiseul-Beaupré-Daillecourt.

Biographie[modifier | modifier le code]

Le comte et son frère le chevalier de Choiseul en Savoyards, François-Hubert Drouais, 1758.

Marie Gabriel Florent Auguste de Choiseul est le fils de Marie Gabriel Florent, comte de Choiseul, seigneur d'Aillecourt, Meuvy (1728-1753), et de Marie Françoise Lallemant de Betz (1732-1793), le petit-fils de Michel Joseph Hyacinthe Lallemant de Betz, chevalier, seigneur de Nanteau sur Lunain, Treuzy, fermier-général, qui donna à la Bibliothèque royale en 1753 une collection de plus de treize mille estampes[2], et de Marie Marguerite Maillet de Batilly[3]. Il est aussi le frère de Michel Félix Victor de Choiseul Daillecourt, officier, député aux États généraux de 1789.

Dès ses études au collège d'Harcourt, Choiseul-Gouffier se passionne pour les antiquités. Il est ensuite marqué par de fréquentes rencontres avec Jean-Jacques Barthélemy, l'auteur du Voyage d'Anarcharsis, qu'il rencontre chez son cousin le duc de Choiseul.

Ami de Talleyrand, avec qui il avait sympathisé dès le collège d'Harcourt, il partage avec lui les intrigues de la Cour et lui déconseille de s'engager dans la voie religieuse.

En 1776, il part pour la Grèce à bord de la frégate Atalante, commandée par le marquis de Chabert, féru d'astronomie. Accompagné notamment du peintre Jean-Baptiste Hilaire, de l'ingénieur Jacques Foucherot et de son secrétaire François Kauffer (qui est aussi ingénieur), Choiseul-Gouffier visite alors le sud du Péloponnèse, les Cyclades et d'autres îles de l'Égée puis l'Asie mineure. À son retour, il entreprend la publication du premier volume, comportant illustrations et relevés architectoniques, de son Voyage pittoresque de la Grèce qui remporte un grand succès. L'ouvrage a un but politique : expliquer les enjeux en mer Égée entre l'Empire ottoman et l'Empire russe. Cette publication facilite sa carrière intellectuelle et politique.

Membre de l'Académie française[modifier | modifier le code]

Il devient membre de l'Académie des inscriptions et belles-lettres en 1779, puis est élu en 1783 au 25e fauteuil de l'Académie française, où il succède à d'Alembert. Il y est reçu par Condorcet le [4] et y siège jusqu'à la suppression de l'Académie, en 1793. À la réouverture de celle-ci, en 1803, il ne fait pas partie des nouveaux membres, mais y reprend place en 1816, jusqu'à sa mort[5].

À Constantinople puis en Russie[modifier | modifier le code]

Ambassadeur à Constantinople de 1784 à 1791, il en profite, accompagné par l'aîné de ses fils, pour poursuivre sa découverte de la Grèce, avec la collaboration de l'archéologue et dessinateur Louis François Sébastien Fauvel, qu'il emploie à la réunion d'une documentation pour la suite de son Voyage pittoresque[6].

La Révolution française change le cours de son destin. Refusant d'obéir à la Convention, il s'oppose, de crainte d'être guillotiné, à son rappel en France. Alors que ses biens sont saisis en France, un autre ambassadeur est envoyé pour le remplacer mais le sultan ottoman Sélim III refuse de le recevoir[7]. Choiseul-Gouffier tient alors le siège durant un an dans son ambassade.

En 1792, il est rejoint à Constantinople par l'abbé Charles Dominique Nicolle, précepteur de son second fils[8]. Ensemble, ils émigrent en Russie, en décembre 1792[9].

Le comte de Choiseul est nommé directeur de l'Académie des Arts et des Bibliothèques impériales de Russie : en 1797, il reçoit du tsar Paul Ier la mission de créer à Saint-Pétersbourg la première bibliothèque publique russe, à partir, notamment, de la bibliothèque Załuski[10].

L'impératrice Catherine II, puis le tsar Paul 1er, lui vouent une grande amitié et lui donnent des terres et un domaine, à Koliacheff, en Galicie[11].

Son frère l'ayant rejoint en Russie, se voit donner un domaine en Crimée, où il meurt prématurément[12].

Retour en France[modifier | modifier le code]

Il rentre en France en 1802, après que Napoléon eut amnistié la noblesse exilée.

Retrouvant son ami Talleyrand, il refuse de participer au gouvernement de l'Empire, et reste fidèle à Louis XVIII.

En 1809, il publie la première partie du second tome de son Voyage pittoresque de la Grèce[13].

À partir de 1812, il se fait construire, à Paris, près des Champs-Élysées, au lieu-dit Folie Marbeuf, aujourd'hui rue Lincoln, une maison en forme de temple grec imitant l'Érechthéion, encore inachevée lorsqu'il meurt. Cet édifice sera ensuite acquis par Émile de Girardin[14].

Il y rassemble les sculptures, telles que l'Apollon de Choiseul-Gouffier, et les moulages, subsistant de ses explorations en Grèce, que Talleyrand et d'autres amis l'aident à se faire restituer[15],[16].

Les efforts menés à titre privé par Choiseul Gouffier pour constituer cette collection, juste avant la Révolution, apparaissent comme précurseurs de la politique publique menée, avec des moyens autrement importants, par Napoléon lors de la campagne d'Égypte[17].

À la fin du premier Empire, il est fréquemment en contact avec son ami Talleyrand, pour qui il sert d'émissaire officieux avec Louis XVIII[18], qu'il représentait déjà à la cour de Russie, pendant son émigration.

A la première Restauration, il est promu au grade de lieutenant-général par ordonnance du 17 août 1814, et nommé membre du conseil privé.

Lors de la négociation du Traité de Vienne, son ami Talleyrand y fait insérer une clause concernant le remboursement par l'Autriche d'une somme importante avancée par Choiseul Gouffier aux officiers autrichiens prisonniers des Turcs[19], pendant son ambassade à Constantinople[20].

À la seconde Restauration, il est nommé, par ordonnance du 17 août 1815, pair de France héréditaire. Il siège parmi les soutiens des gouvernements de la Restauration, au contraire de son cousin le duc de Choiseul-Praslin, qui siège avec les libéraux. Il retrouve son fauteuil à l'Académie Française en 1816.

Après sa mort, sa collection d'antiquités passe en vente publique en 1818[21],[22] et est acquise en partie par le musée du Louvre[23]

D'autres œuvres, comme la statue romaine en marbre d'Apollon, sont conservées dans d'autres musées[24].

Le seconde partie du tome 2 de son Voyage pittoresque de la Grèce ne paraît qu'après sa mort, en 1822.

Mariage et descendance[modifier | modifier le code]

Il épouse en premières noces, à Paris, paroisse Saint Roch, le , Adélaïde Marie Louise de Gouffier d'Heilly (1752 - Paris, 6 mai 1816), inhumée au cimetière de Picpus, fille de Charles Antoine de Gouffier, marquis d'Heilly, et de Marie Catherine Phélypeaux d'Outreville. Fille unique, elle lui apporte notamment le domaine et le château d'Heilly, près d'Amiens. À la Révolution, elle reste en France avec leurs trois plus jeunes filles. Emprisonnées à Amiens pendant la Terreur, elles échappent à la guillotine.

Il se remarie le avec la princesse Hélène de Bauffremont-Courtenay (1774-1836), auteur en 1828 d'un poème sur Jeanne d'Arc[25], fille de Joseph de Bauffremont-Courtenay, prince de Listenois, vice-amiral de France, et de Louise Bénigne de Bauffremont Courtenay. Elle était la sœur d'Alexandre de Bauffremont Courtenay, 1er duc de Bauffremont.

De son premier mariage, sont issus six enfants :

Paulin Guérin, Portrait de Zéphyrine Olympe de Choiseul Gouffier, comtesse de Moreton Chabrillan, 1823

Le Voyage pittoresque de la Grèce[modifier | modifier le code]

Choiseul-Gouffier y présente, en plus de monuments peu connus, une Grèce idéalisée, écrasée par la domination ottomane et désirant retrouver sa liberté pour ressusciter. Cette vision romantique de la Grèce moderne est partagée par de nombreux voyageurs du début du XIXe siècle.

Sa portée politique est importante, elle contribue au Philhellénisme, amour de la Grèce, idée qui aboutira à l'indépendance du pays, en 1830, après la guerre d'indépendance grecque, une révolte des autochtones contre l'occupation ottomane. En 1828, l'engagement de la France aux côtés de la Grèce naissante, se concrétisera par une expédition militaire et scientifique, l'Expédition de Morée, dont le volet scientifique apparaît comme le prolongement posthume des explorations menées par Choiseul Gouffier.

Comme les autres voyageurs en Grèce, Choiseul-Gouffier se propose d'aller voir sur place le texte à la main, pour mieux comprendre les auteurs antiques « pour sentir plus vivement les beautés différentes des tableaux tracés par Homère en voyant les images qu'il avait eues sous les yeux. ». Le récit de Choiseul-Gouffier permet de faire connaître des régions jusque-là encore inconnues de la Grèce, comme les Cyclades. Il avait demandé au peintre qu'il protégeait, Turpin de Crissé, d'illustrer le deuxième volume par la gravure de ses dessins. Il recruta aussi dans ce but Louis-François-Sébastien Fauvel et l'envoya en Grèce pour des dessins complémentaires.

L'ouvrage comporte une abondante iconographie, représentant des monuments, des paysages, des cartes, autour de laquelle le texte est rédigé.

Les dessins sont gravés par les meilleurs artistes parisiens de l'époque, tels Pierre-Philippe Choffard, Moreau le jeune, Jacques Aliamet, Pierre-Gabriel Berthault.

Le tome 1 paraît en livraisons et par souscription, à partir de 1778, la page de titre portant la date de 1782[29]. Le tome 2 paraît avec une iconographie moins développée et plus de texte, en deux volumes, le premier en 1809[30], le second après la mort de l'auteur, en 1822, avec son portrait en frontispice et l'histoire de sa vie[31],[32].

On trouve parmi ses Mémoires une Dissertation sur Homère, un mémoire sur l'hippodrome d'Olympie, et des Recherches sur l'origine du Bosphore de Thrace.

Entre autres œuvres d'art, il posséda des Ruines d'architecture par Hubert Robert, tableau gravé par Demoulin dans une estampe portant ces mots : « Dédiées à l'ami des arts » (coll. pers.).

Portrait[modifier | modifier le code]

Son portrait, peint par Boilly, est vendu par Artcurial le 21 septembre 2022 pour 22 300 euros[33]. Il en existe une variante avec le col uni, non fleurdelysé[34].

Annexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. « https://francearchives.fr/fr/file/ad46ac22be9df6a4d1dae40326de46d8a5cbd19d/FRSHD_PUB_00000355.pdf »
  2. Auguste Flandrin, Bibliothèque nationale - Département des Estampes : Inventaire de la collection Lallemant de Betz, Paris, J. Dumoulin, , VII+788 (lire en ligne), p. V-VII.
  3. « Actes Lallemant de Betz », sur Familles parisiennes.org (consulté le )
  4. Discours prononcés dans l'Académie française le jeudi XXVI février MDCC. LXXXIV à la réception de M. le comte de Choiseul Gouffier, Paris, Demonville, mdcc. lxxxiv, 30 p. (lire en ligne)
  5. « Marie Gabriel Florent Auguste de Choiseul Gouffier », sur academie-française.fr (consulté le ).
  6. Chantal Grell, « Les Ambigüités du Philhellénisme - L'ambassade du comte de Choiseul Gouffier auprès de la Sublime Porte (1784-1792) », Dix-huitième siècle,‎ , p. 223-235 (lire en ligne)
  7. Baptistin Poujoulat, Histoire de Constantinople comprenant le Bas-Empire et l'Empire Ottoman, t. II, Paris, Librairie d'Amyot, (lire en ligne), chap. XLIX, p. 423
  8. Abbé Frappaz, Vie de l'abbé Nicolle: vicaire général et chanoine honoraire de Paris, Paris, Jacques Lecoffre & Cie, 1857, p. 17. Ouvrage numérisé.
  9. Catherine Boppe-Vigne, « Emigrés français de Constantinople en Russie pendant la Révolution, pages 411-420 », sur books.google.fr (consulté le )
  10. Ludmila Wolfzun, « Le comte de Choiseul-Gouffier, premier directeur de la Bibliothèque impériale publique de Russie », Histoire et civilisation du livre,‎ , p. 329-338 (lire en ligne)
  11. Duchesse de Saulx Tavannes, Sur les routes de l'émigration - Mémoires de la duchesse de Saulx Tavannes (1791-1806), publiés par le marquis de Valous, Paris, Calmann-Lévy, , 179 p., p. 92 & 103-104
  12. Duchesse de Saulx Tavannes, Sur les routes de l'émigration - Mémoires de la duchesse de Saulx-Tavannes (1791-1806), publiés par le marquis de Valous, Paris, Calmann-Lévy, , 179 p., p. 74 & 107-108.
  13. Léonce Pingaud, Choiseul Gouffier - La France en Orient sous Louis XVI, Paris, Alphonse Picard, , IX+297 (lire en ligne), p. 281.
  14. Frédéric Barbier, Le Rêve grec de Monsieur de Choiseul : les voyages d'un Européen des Lumières, Paris, Armand Colin, , 302 p. (ISBN 978-2-200-24863-5), p. 256-258.
  15. Léonce Pingaud, Choiseul Gouffier - La France en Orient sous Louis XVI, Paris, Alphonse Picard, , IX+297 (lire en ligne), p. 280.
  16. Alessia Zambon, « From Constantinople to Paris : the difficult "repatriation" (1787-1817) of Choiseul Gouffier collection », sur academia.edu, (consulté le )
  17. Chantal Grell, « Les Ambigüités du Philhellénisme - L'Ambassade du comte de Choiseul Gouffier auprès de la Sublime Porte », Dix-huitième siècle,‎ , p. 234-235 (lire en ligne).
  18. Léonce Pingaud, Choiseul Gouffier - La France en Orient sous Louis XVI, Paris, Alphonse Picard, , IX+297 (lire en ligne), p. 285
  19. Léonce Pingaud, Choiseul Gouffier - La France en Orient sous Louis XVI, Paris, Alphonse Picard, , 297 p. (lire en ligne), p. 194-216
  20. Duchesse de Saulx Tavannes, Sur les routes de l'émigration - Mémoires de la duchesse de Saulx Tavannes (1791-1806), publiés par le marquis de Valous, Paris, Calmann-Lévy, , 179 p., p. 165.
  21. L. J. J. Dubois, Catalogue d'antiquités égyptiennes, grecques, romaines et celtiques, copies d'antiquités, modèles d'édifices anciens, sculptures modernes, tableaux, dessins, cartes, plans, colonnes, tables et meubles précieux formant la collection de feu M. le Cte de Choiseul Gouffier, Paris, Dubois & Petit-Cuenot, , XVI+156+7 (lire en ligne)
  22. François Queyrel, « Un nouveau document sur la collection Choiseul Gouffier », Compte-rendu des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-lettres,‎ , p. 1143-1159 (lire en ligne)
  23. Émile Esperandieu, « Renseignements inédits sur la collection du comte de Choiseul Gouffier », Mémoires de la Société nationale des Antiquaires de France - sixième série, tome huitième,‎ , p. 161-211 (lire en ligne).
  24. Antoine Héron de Villefosse, « Tête d'Apollon (Musée du Louvre) », dans Monuments et mémoires de la Fondation Eugène Piot, tome 1, fascicule 1, 1894, p. 61-76 Lire en ligne.
  25. Romain Vaissermann, « La Couronne de Jeanne d'Arc », sur free.fr (consulté le )
  26. Vladislav Rjeoutski, « Les Français dans la franc-maçonnerie russe au siècle des lumières : Hypothèses et pistes de recherches », sur classiques.ucaq.ca (consulté le )
  27. « Choiseul Beaupré, dit Choiseul Gouffier », sur senat.fr (consulté le )
  28. « Deux siècles d'histoire au cimetière du Père Lachaise », sur memodoc.com (consulté le )
  29. « Voyage pittoresque de la Grèce. t. 1 - 1782 », sur Gallica (consulté le )
  30. « Voyage pittoresque de la Grèce.. T. 2. - 1809 », sur Gallica (consulté le )
  31. « Voyage pittoresque de la Grèce. T. 3. - 1822 », sur Gallica (consulté le )
  32. Frédéric Barbier, Le Rêve grec de Monsieur de Choiseul : les voyages d'un Européen des Lumières, Paris, Armand Colin, , 302 p. (ISBN 978-2-200-24863-5), p. 124-152 & 245-256
  33. « Louis Léopold Boilly, portrait de Marie Gabriel Florent Auguste de Choiseul Gouffier », sur artcurial.com (consulté le )
  34. Etienne Bréton & Florent Zuber, Boilly - Le peintre de la société parisienne de Louis XVI à Louis-Philippe, tome 2, Paris, Arthena, , 1006 p. (ISBN 978-2903239640), p. 769

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