Hôtel de Spangen

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Hôtel de Spangen
L'Hôtel de Spangen vu depuis le centre de la place Royale.
Présentation
Type
Style
Architecte
Construction
1776-1777
Occupant
Localisation
Pays
Régions de Belgique|Région
Commune de Belgique
Coordonnées
Carte

L'Hôtel de Spangen est un édifice qui fait partie du vaste ensemble architectural de style néo-classique de la place Royale de Bruxelles construit entre 1775 et 1782 par les architectes français Jean-Benoît-Vincent Barré et Barnabé Guimard à l'époque des Pays-Bas autrichiens.

Il abrite depuis 2000 une aile du musée des Instruments de musique de Bruxelles (MIM).

Localisation[modifier | modifier le code]

L'Hôtel de Spangen est situé à l'angle de la place Royale et de la rue Montagne de la Cour qui descend vers le Mont des Arts.

Il occupe plus précisément le no 13 et le no 14 de la place Royale, entre la rue Montagne de la Cour et l'Hôtel de Grimbergen.

Situation de l'Hôtel de Spangen sur la place Royale.

Historique[modifier | modifier le code]

Historique de la place Royale[modifier | modifier le code]

Au XVIIIe siècle, les autorités autrichiennes souhaitent édifier à l'emplacement de l'ancien palais du Coudenberg, incendié en 1731, une place monumentale inspirée des modèles français tels la place Stanislas de Nancy (1755) et la place Royale de Reims (1759)[1].

Le projet est approuvé en 1774 par l'impératrice Marie-Thérèse d'Autriche[1], qui autorise la démolition du palais[2].

En 1776, le projet devient un plan urbanistique monumental comportant huit pavillons, qui est confié aux architectes français Jean-Benoît-Vincent Barré, qui conçoit le projet de base, et Barnabé Guimard, qui assure la réalisation des plans détaillés[2].

En raison des coûts élevés, le gouvernement fait appel à l'abbaye du Coudenberg, à l'abbaye de Grimbergen, à la corporation des Brasseurs, à la Loterie impériale et royale des Pays-Bas ainsi qu'à des particuliers comme le comte de Spangen, la comtesse de Templeuve et le marchand de vins Philippe de Proft[2],[3].

Historique de l'Hôtel de Spangen[modifier | modifier le code]

La Cour d'Hoogstraeten, site sur lequel a été édifié l'Hôtel de Spangen, entourée d'un trait jaune sur le plan de Fricx dressé en 1712.
Hôtel de Spangen : entouré en bleu l'hôtel édifié en 1776-1777, en vert les annexes domaine de l'Etat et en jaune les autres annexes - Extrait du Plan Popp, Bruxelles, Section 7 - 1866.

Le une partie de l'ancienne « Cour d'Hoogstraeten[4] » - jadis propriété d'Antoine de Lalaing - est cédée à la Ville de Bruxelles par Marie-Louise, comtesse douairière zu Salm-Salm (née princesse de Hesse-Rheinfels-Rothenbourg (1729-1800), veuve depuis 1773 de Maximilien Prince zu Salm-Salm, duc de Hoogstraten)[5] puis vendue le pour la somme de 38 000 florins à Corneille Juste Philibert Philippe comte de Spangen, baron de Herent, issu d'une famille au service des Habsbourg depuis plusieurs générations, chambellan de la Cour de Vienne[6] (1726-1817)[7] qui la fait partiellement démolir pour édifier l'Hôtel de Spangen au cours des années 1776-1777[8].

Façade de l'Hôtel de Spangen donnant sur la Place Royale.
Portique reliant l'Hôtel de Spangen à l'Hôtel de Grimbergen.

Peu après, le comte de Spangen construit au nord de l'Hôtel une cour d'honneur entourée de dépendances, une aile nord qui porte les no 11 et no 12 de la place Royale[8]. À sa mort en 1817, sa propriété passe aux van der Linden, barons d'Hooghvorst[5], ses lointains parents, dont plusieurs membres sont impliqués dans la vie politique belge[9]. Les bâtiments sont ensuite rachetés et occupés dès par le Prince d'Orange jusqu'à leur mise sous séquestre en avant d'être rendus au gouvernement belge en 1842[10].

Corps central[modifier | modifier le code]

L'Hôtel de Spangen qui porte les no 13 et no 14 de la place Royale connaît dès le XIXe siècle plusieurs propriétaires et affectations au fil du temps[11]. L'immeuble est divisé en plusieurs lots[12], lesquels seront de nouveau regroupés dans les mains d'un propriétaire unique l'Old England en 1913, puis l'État belge depuis 1979 :

  • XIXe siècle[13] : l'Hôtel Britannique, lequel devient en 1850 l'Hôtel de la Grande-Bretagne existant encore en 1866 et tenu par Duhent  ;
  • jusqu'en 1911 : Taverne de la Régence ou Taverne Strobbe accueillant fréquemment des réunions culturelles ou scientifiques;
  • 1886 : grands magasins « Old England », acquéreurs successifs de plusieurs lots en 1905, 1909 et 1911[14] (le bâtiment Art nouveau construit en 1898-99 par Paul Saintenoy n'étant en fait que son extension) ;
  • 1974 : marchand de tapis « Rêve d'Orient » ;
  • 1979 : achat par l'État belge en vue d'y installer le Musée des instruments de musique de Bruxelles lequel ouvrira ses portes au public en 2000.

En 1913, les travaux réalisés pour le compte de l'Old England impliquent la destruction totale de l'intérieur et des décors de l'Hôtel de Spangen, lequel ne conserve de son corps central initial que ses façades extérieures[15].

Aile nord[modifier | modifier le code]

L'édifice qui borde le fond de la cour d'honneur, construit par le Comte de Spangen peu après 1777 et dont la grille d'entrée est incluse dans le portique reliant l'Hôtel de Spangen à l'Hôtel de Grimbergen (no 11-12), devient domaine de l'État et connaît lui aussi de multiples affectations au cours des siècles[8] :

Annexe (aile nord) de l'Hôtel de Spangen.
Façade Nord enduite, mais non peinte, de l'Hôtel de Spangen donnant sur la cour intérieure.

Architecture[modifier | modifier le code]

Maçonneries[modifier | modifier le code]

L'Hôtel de Spangen présente trois façades enduites (dont deux sont peintes en blanc - celle donnant sur la place Royale et celle rue Montagne de la cour - comme tous les pavillons de la place Royale ainsi que la plupart des immeubles néoclassiques dessinés par Guimard autour du Parc de Bruxelles (Hôtel Errera, Hôtel de Ligne, Hôtel Empain, le « Lambermont »...) - et dont l'autre (celle donnant vers la cour de l'aile Nord) est laissée en l'état.

Ceci résulte de l'édit du gouvernement de 1781 qui ordonne d'enduire les façades de tous les pavillons de la place Royale[16]. Cet édit confirme le cahier des charges établi dès 1776 qui prévoit que "tout le soubassement et rustique, y compris les corniches, clefs, consoles et moulures, depuis le rez-de-chaussée jusqu'au premier étage, doivent être exécutés en pierres de taille soit bleues ou blanches"[17]. Les mêmes matériaux doivent être employés "depuis la corniche qui termine le rustique et forme le socle de l'appui des fenêtres du premier étage", ainsi que pour "tous les chambranles des fenêtres, tant du premier étage que de l'attique" et pour "la grande corniche architravée d'ordre ionique à modillons, sa balustrade, ses piédestaux, et ses tablettes avec son astragale qui couronne le tout". Une tolérance est laissée pour "les trumeaux formant les pilastres et vides entre les fenêtres" qui peuvent être exécutés en briques.

Façades[modifier | modifier le code]

Le bâtiment de trois niveaux présente huit travées le long de la place Royale et huit le long de la rue Montagne de la Cour. Sa façade latérale (rue Montagne de la Cour) est donc plus large que l'Hôtel du Lotto qui lui fait face.

Le rez-de-chaussée est rythmé par une succession d'arcades cintrées à imposte et clé d'arc à perles et volutes, séparées par une maçonnerie à bossages plats et à lignes de refend. Autour de l'arc des arcades, les bossages adoptent un profil rayonnant, typique de l'architecture néo-classique. Dans chaque baie cintrée est inscrite une fenêtre à arc surbaissé possédant un appui de fenêtre supporté par deux corbeaux à motif de gouttes.

Séparé du rez-de-chaussée par un entablement, le premier étage est percé de hautes fenêtres rectangulaires à meneau et traverse de bois. Ces fenêtres, à l'encadrement mouluré, sont ornées à leur base d'une allège à balustrade et à leur sommet d'un petit entablement à frise de denticules soutenu par des consoles rectangulaires.

Le deuxième étage est percé de fenêtres plus petites, dont l'ornementation se réduit à un encadrement mouluré, et sommé d'une corniche en forte saillie soutenue par des modillons rectangulaires, elle-même surmontée d'une balustrade en attique.

La façade de la place Royale est percée de deux grandes doubles portes en chêne peintes en blanc et surmontées chacune d'une fenêtre d'imposte et d'un cartouche sur lequel est écrit « Musée des Instruments de Musique » au-dessus des portes à gauche et « Muziekinstrumentmuseum » au-dessus des portes à droite. La fenêtre située au-dessus de chaque porte est précédée d'un balcon à balustrade de pierre soutenu par des consoles ornées de volutes et de feuilles d'acanthe. Les châssis fenêtres sont également construits en bois de chêne et peints à l'huile selon la couleur désignée par l'architecte[18]

La façade disposée le long de la rue Montagne de la Cour est très semblable, à quelques détails près. Elle comporte huit travées comme la façade de la place Royale mais la dernière travée à gauche (contre l'édifice Art nouveau de Saintenoy) est fort différente des sept autres : elle ne comporte pas de bossages au rez-de-chaussée, est en retrait et n'a pas de corniche.

Toitures[modifier | modifier le code]

Le cahier des charges établi en 1776 prévoit que "tous les toits des façades seront couverts d'ardoises", que l'on "sera tenu de les élever à la hauteur et selon la pente uniformément désignée dans le plan" et qu'il ne sera pas permis d'y construire des tuyaux de cheminée visibles depuis la place Royale[19]. À la suite des rénovations des années 1990, la toiture de l'ensemble du bâtiment est désormais en zinc et à tasseaux.

Galerie[modifier | modifier le code]

Arcade cintrée et fenêtre surbaissée au rez-de-chaussée.
Corbeau à motif de gouttes et rudentures vu de profil.
Corbeau à motif de gouttes et rudentures vu de face.
Huisserie extérieure de la double porte de gauche donnant sur la Place Royale.
Motif floral sculpté sur l'une des portes de l'Hôtel de Spangen.
Cartouche surmontant les doubles portes de gauche donnant sur la Place Royale.
Appui de fenêtre du premier étage supporté par deux corbeaux.
Balustrade en attique de l'Hôtel de Spangen donnant vers l'Hôtel du Lotto (actuel Musée Magritte).

Accessibilité[modifier | modifier le code]

Ce site est desservi par les stations de métro : Gare Centrale et Parc.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a et b Le Patrimoine monumental de la Belgique, Bruxelles, Volume 1C, Pentagone N-Z, Pierre Mardaga éditeur, 1994, p.222
  2. a b et c Le Patrimoine monumental de la Belgique, Bruxelles, Volume 1C, Pentagone N-Z, op. cit., p.223
  3. Brigitte D'Hainaut-Zveny, Un exemple de mise en scène urbaine. La place Royale de Bruxelles (1774-1784), allégorie d'un nouveau rapport politique au siècle des Lumières, in Performing Arts in the Austrian 18th Century: New Directions in Historical and Methodological Research, University of Gent, 1999, p.53
  4. Cnockaert Laeticia et Sylvianne Modrie "L'Hôtel d'Hoogstraeten au 16e siècle" in "Le Palais du Coudenberg à Bruxelles, Bruxelles, 2014, p.255 décrivent l'ancienne cour d'Hoogstraeten comme un ensemble constitué au début du 16e siècle par la réunion de plusieurs demeures d'origine médiévale. L'Hôtel d'Hoogstraeten, vaste propriété d'Antoine de Lalaing, s'étendant en forme de U sur plus de quarante ares occupait toute la partie comprise entre la rue Montagne de la Cour, l'actuelle rue Villa Hermosa, l'ancienne rue Terarken et le premier tronçon de la rue Isabelle aujourd'hui disparue. Son voisinage immédiat avec la cour, son architecture remarquable et son jardin en faisaient un bien d'exception.
  5. a et b Henne Alexandre, Wauters Alphonse, Histoire de la ville de Bruxelles, Bruxelles, 1845, tome III p.317
  6. Acte passé à Bruxelles le 22 février 1777 devant Henry Joseph Le Corbesier, Notaire Royal concernant l'acquisition par la ville de Bruxelles d'une parcelle de terrain faisant anciennement partie de l'Hôtel d'Hoogstraeten indispensable à l'exécution de la Place Royale : " fut présent Messire Corneille-Juste-Philibert-Philippe, Comte de Spangen et Uytternesse, baron de Herent, Oosterhem, Wychmael, etc ... Chambellan actuel de Leurs Majestés Impériales et Roiales (sic), assesseur de l'Etat Noble de Brabant" - Archives de la Ville de Bruxelles, Fonds Travaux Publics, liasse 510
  7. Goethals Frédéric-Victor, Dictionnaire généalogique et héraldique des familles nobles du royaume de Belgique, Bruxelles, 1852, tome IV
  8. a b et c Le Patrimoine monumental de la Belgique, Bruxelles, Volume 1C, Pentagone N-Z, Pierre Mardaga éditeur, 1994, p.238
  9. Le plan Popp de 1866 renseigne que Joseph baron d'Hooghvorst est propriétaire de la parcelle cadastrée 683, une des parties de l'Hôtel de Spangen donnant sur la place Royale
  10. Smolar Meynart A. et al, Le quartier royal, Bruxelles, 1998, p.91
  11. Bouwen door de eeuwen heen in Brussel, Stad Brussel 1B, Binnenstad H-O, Pierre Mardaga éditeur, 1993, p.242
  12. Ainsi, le plan Popp dressé en 1866 ne distingue pas moins de quatre lots appartenant à des propriétaires différents.
  13. Baedeker K., Belgique et Hollande : manuel du voyageur, Coblence, 1866, p.55
  14. Hennaut Eric et al, Old England et le Musée des Instruments de Musique, Bruxelles, 2000, pp 18-19.
  15. Hennaut Eric et al, Old England et le Musée des Instruments de Musique, Bruxelles, 2000, pp 19-20.
  16. Le Patrimoine monumental de la Belgique, Bruxelles, Volume 1C, Pentagone N-Z, op. cit. p.224
  17. Des Marez Guillaume, La Place Royale à Bruxelles, Genèse de l'œuvre, sa conception et ses auteurs, Bruxelles, 1923, pp.132-3, pièce justificative n°18 : "Conditions de vente au cahier des charges pour les terreins (sic) de la place Royale insérées dans l'acte d'acquisition d'un terrain par Philippe de Proft (sic) le 17 janvier 1776, article 11
  18. Des Marez Guillaume, La Place Royale à Bruxelles, Genèse de l'œuvre, sa conception et ses auteurs, Bruxelles, 1923, pp.132-3, pièce justificative n°18 : "Conditions de vente au cahier des charges pour les terreins (sic) de la place Royale insérées dans l'acte d'acquisition d'un terrain par Philippe de Proft (sic) le 17 janvier 1776, article 17
  19. Des Marez Guillaume, La Place Royale à Bruxelles, Genèse de l'œuvre, sa conception et ses auteurs, Bruxelles, 1923, pp.132-3, pièce justificative n°18 : "Conditions de vente au cahier des charges pour les terreins (sic) de la place Royale insérées dans l'acte d'acquisition d'un terrain par Philippe de Proft (sic) le 17 janvier 1776, article 16

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Arlette Smolar-Meynart et André Vanrie, Le quartier royal (Bruxelles), CFC Éditions, , 318 p. (ISBN 978-2-930018-17-1).