François Kemlin

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François Kemlin
Biographie
Naissance
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Voir et modifier les données sur Wikidata (à 71 ans)
TrévouxVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalités
belge (à partir de )
françaiseVoir et modifier les données sur Wikidata
Activités

François Kemlin, parfois écrit Kemelin conformément à sa prononciation, est un ingénieur chimiste né à Rambervillers (Vosges) le et mort à Trévoux, dans l'Ain le , pionnier de l'industrie du verre-cristal au plomb à Vonêche[1], d'abord homme de confiance d'Aimé-Gabriel d'Artigues, puis industriel en Belgique[2]. Ce chimiste des cristalleries de Vonêche, fondateur de nombreux sites industriels verriers et chimiques, s'est fait naturaliser belge après 1830[3].

Issu de la chimie verrière, il n'en est pas moins considéré comme un des fondateurs exemplaires de la chimie industrielle belge.

Biographie[modifier | modifier le code]

Issu d'une famille bourgeoise assez peu fortunée, fils de Joseph Kemlin, négociant à Rambervillers, François Kemlin aurait appris, selon la légende locale, la chimie avec quelques pharmaciens et des industriels alsaciens[4].

Aimé-Gabriel d'Artigues, directeur de la cristallerie de Saint-Louis-lès-Bitche le recrute pour son laboratoire de recherche sur les verres au minium vers 1802 et l'emmène dans son aventure industrielle à Vonêche[1]. Il participe à la fondation de la cristallerie impériale.

François Kemlin est nommé directeur d'usine à Vonêche, lorsque son patron est forcé de partir installer une succursale en France, à Baccarat. Kemlin gère la manufacture avec difficulté, parvenant à équilibrer les comptes et garder l'outil de travail, avec le minimum d'investissement sans bénéficier d'un bon carnet de commande, à cause de la crise économique qui ravage l'ancien Empire napoléonien au début de la Restauration jusqu'en 1820. Kemlin, patron intelligent, sait déjà déléguer des responsabilités d'opérations unitaires à de jeunes ingénieurs prometteurs venus de toute l'Europe du Nord, toutefois essentiellement anglo-saxons. Dès 1820, il est secondé par l'ingénieur-chimiste Auguste Lelièvre, avec lequel il continue des recherches en pointe sur les techniques verrières de l'époque.

Après le retrait des affaires directoriales du financier Aimé Gabriel d’Artigues, après sa vente, obligée pour raisons de dettes, de sa cristallerie et du château de Baccarat en 1822, il devient son administrateur fondé de pouvoir pour ses affaires de cristallerie. Il constate la migration de plus en plus importante des jeunes meilleurs maîtres verriers vers Baccarat, même après la vente. Comprenant la dépréciation inéluctable du site de Vonêche, faute de capitaux investis, et avec la fuite accélérée de l'excellence ouvrière vers Baccarat, il veut infléchir cette politique industrielle et demande à acheter la manufacture de Vonêche en juillet 1825.

Constatant le refus ferme de son mentor et patron, devenu essentiellement bourgeois rentier, l'homme de l'art, avec l'aide financière rassemblée par le baron de Bonaert, se décide à partir avec une centaine d'ouvriers pour fonder une cristallerie dans le Val Saint-Lambert[5],[6], avec l'appui de financiers et banquiers locaux[7]. Le créateur devient son premier directeur de 1826 à 1828. Jouant sur la diversité des productions, autant le plus souvent simples et accessibles, que luxueuses, l'entreprise devient prospère. Elle aura ainsi capté plus de 250 ouvriers, en provenance de la manufacture de Vonêche, qui connaîtra un déclin rapide[8].

Après des différends de politique industrielle avec les dirigeants financiers, il quitte la verrerie et la cristallerie du Val-Saint-Lambert après douze années de direction vers 1838. Il joue un rôle de conseiller technique auprès des industriels de la verrerie et de la chimie naissante, puis fonde entre 1837 et 1843 avec la collaboration éphémère du jeune chimiste français Alphonse Clément-Desormes la première glacerie belge à Sainte-Marie-d'Oignies, au lieu-dit du prieuré, à Aiseau-Presles près la rivière Sambre.

François Kemlin se retire des affaires quelques années plus tard et prend sa retraite en France, en rejoignant le pays natal de son épouse dans la Dombes[9]. François Kemlin, administrateur de l'hôpital de Trévoux, repose au cimetière de Trévoux en premier défunt dans la chapelle funéraire des familles Kemlin et Sausset, plus tard laissée aux sœurs dominicaines de Bourg-en-Bresse[10].

Chimiste verrier remarquable, homme d'affaires avisé et patron paternaliste[modifier | modifier le code]

François Kemlin est considéré de nos jours unanimement en Wallonie actuelle comme un industriel pionnier de la jeune chimie industrielle belge.

Vers 1840, il développe, avec son comparse ingénieur Auguste Lelièvre, la société de Vedrin qui exploite une concession de mines de plomb, contrôle la fusion du métal plomb, mais extrait aussi la pyrite autrefois délaissée. Chercheur conscient de la nécessaire pureté des produits chimiques de base, François Kemlin met au point un procédé efficace pour la fabrication de l'acide sulfurique par l'emploi immédiat de la pyrite.

Au Val-Saint-Lambert, le directeur général de la cristallerie suit l'exemple bienveillant et continue l'action paternaliste de celui qui restera malgré leurs brouilles son premier modèle en industrie, Aimé-Gabriel d'Artigues. Son administration technique nullement pléthorique développe une action sociale complexe avec la construction d’habitations ouvrières pourvues du confort moderne, la création d’une caisse d’épargne et d’une caisse d'assurances et de secours aux malades, ainsi que des équipements pour accueillir des cercles de musique, association de dessin, classe de lecture et de théâtre pour les ouvriers en repos et surtout les enfants des ouvriers.

Le rayonnement international de la chimie belge à la Belle Époque est tributaire de cette génération pionnière, à laquelle il a participé et ouvert des perspectives avec autant de générosité que d'intelligence.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a et b Fernando Montes de Oca, L'âge d'or du verre en France, 1800-1830 : verreries de l'Empire et de la Restauration, 2001, p. 47-49.
  2. Google books The Grove Encyclopedia of Decorative Arts, Volume 1, Page 509, en anglais
  3. François Kemlin est toujours honoré en Belgique : il apparaît avec une maladroite coquille orthographique nominale en titre, soit une inversion de l et m, dans le dictionnaire de la Wallonie sur le site « Connaître la Wallonie » Wallonie.be. Wallons marquants, dictionnaire, Kemlin François
  4. Cette légende d'un parcours industriel en Alsace préalable semble peu crédible. L'apprentissage précoce au laboratoire avec un maître apothicaire est par contre commun.
  5. Google books Miller's Field Guide: Glass Par Judith Miller, Page 161 en anglais
  6. Google books L'histoire de la verrerie en Belgique du IIme siècle à nos jours, P 169, 172, 267
  7. Joseph Philippe, Le Val-Saint-Lambert : ses cristalleries et l'art du verre en Belgique, Halbart, 1974.
  8. Google books Silicates industriels, Volumes 11-13, La Carrière de François Kemlin
  9. Il avait épousé en 1814 Françoise Marie Sausset ; son épouse décède onze ans après lui en 1866.
  10. Geneviève Jourdan, Inventaire général du patrimoine culturel de la région Rhône-Alpes, Sur la chapelle funéraire des familles Sausset et Kemlin ou sa fiche technique.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Giuseppe Cappa, Le génie verrier de l'Europe, Témoignages : de l'historicisme à la modernité (1840-1998), éditions Mardaga, Sprimont, Belgique, 1998, 575 pages. (ISBN 9782870096802). Présentation sommaire des cristalleries du Val saint-Lambert pp 51–52.
  • Rosette Choné, La circulation des idées et des hommes entre Meuse et Rhin, Mémoires de l'Académie de Metz, Metz, 2011. Il s'agit aussi du texte écrit, amélioré, d'une conférence messine en 2010. Rosette, membre correspondant de l'Académie messine, prend parmi d'autres l'exemple de l'ingénieur Kemlin, vosgien devenu industriel belge près de la Meuse Extrait des Mémoires de l'Académie nationale de Metz, année 2011 en ligne
  • Léon Dubrul, "Deux français fondateurs d'industries belges : François Kemlin et Auguste Lelièvre", in Revue du Conseil économique wallon, n° 24-25, Liège, 1957, p. 85-87.
  • Jean-Marie Geoffroy, À la recherche d'Aimé Gabriel d'Artigues (1778-1848), fondateur des Cristalleries de Baccarat, La revue lorraine populaire, avril 1983, no 51, p. 142-145.
  • Joseph Philippe (archéologue et ancien directeur de musée d'archéologie et d'arts décoratifs de Liège), Histoire et art du verre, des origines à nos jours, éditions Eugène Wahle, Liège, 1983, 152 p. (ISBN 2-87011-019-7)
  • Collectif, Congrès de l'Association internationale pour l'histoire du verre, Nancy, 23-29 mai 1983.
  • Suzy Pasleau, Industries et populations : l'enchaînement des deux croissances à Seraing au XIXe siècle (« Bibliothèque de la Faculté de philosophie et lettres de l'Université de Liège »), fasc. CCLXXV, série in-8°, Genève, Droz, 1998, 653 p. (ISBN 978-2870192757). En particulier, chap. III, p. 118-120.

Liens externes[modifier | modifier le code]