Ariella Azoulay

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Ariella Azoulay
Biographie
Naissance
Voir et modifier les données sur Wikidata (62 ans)
Nom dans la langue maternelle
אריאלה עאישה אזולאי‎Voir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Formation
Activité
Professeure d'arts plastiquesVoir et modifier les données sur Wikidata
Fratrie
Orly Azoulay (en)
Ilana Bernstein (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Conjoint
Adi Ophir (en)Voir et modifier les données sur Wikidata
Autres informations
A travaillé pour
Distinction
Igor Zabel Award for Culture and Theory (d) ()Voir et modifier les données sur Wikidata

Ariella Aïcha Azoulay est une théoricienne de la photographie, essayiste et cinéaste française et israélienne, née en 1962 à Tel Aviv[1] d'un père originaire d'Algérie[2] et d'une mère née en Palestine, issue d'une famille de juive séfarade venue de Bulgarie et de Grèce. Elle enseigne d'abord la culture visuelle et la philosophie contemporaine à l'Université de Bar Ilan en Israël[3] puis devient titulaire d'une chaire à Brown University aux États-Unis[4].

Milieu familial[modifier | modifier le code]

Le père d'Ariella Azoulay, Roger Azoulay, né à Oran en Algérie en 1923, a été interné sous le régime de Vichy dans le camp de Bedeau entre 1941 et 1943. Après le débarquement anglo-américain au Maroc et en Algérie le 8 novembre 1942, il a servi comme soldat et technicien de radio dans la Division d'Infanterie Algérienne qui a contribué à la libération de la Tunisie et de l'Italie ; il y a reçu plusieurs décorations. Il a émigré en Israël en 1949. D'après S. Slyomovics, Ariella Azoula a choisi d'assumer une identité juive orientale que son père, se revendiquant comme français d'Algérie, avait voulu occulter[5].

À la mort de son père, Ariella Azoulay apprend que sa grand-mère paternelle s'appelait Aïsha et décide d'adopter ce prénom[6].

Recherche[modifier | modifier le code]

Les recherches d'Ariella Azoulay portent notamment sur les rapports de pouvoir en œuvre dans le choix, la fabrication et la circulation des images contemporaines[7],[8]

« Des photographies d'archives, captures d'événements concomitants de la création d'Israël, constituent la matrice de sa recherche. Ariella Azoulay construit une « Histoire potentielle » reliant Palestiniens et Israéliens, contestant l'historiographie officielle d'un conflit inévitable entre les deux peuples[7] ».

L. Silberstein situe la remise en question des postulats du sionisme opérée par Ariella Azoulay dans la lignée des travaux du sociologue Baruch Kimmerling notamment. Comme d'autres auteurs postsionistes, Azoulay met en lumière les effets d'exclusion produits par le discours sioniste[9].

À l'occasion d'une exposition de photos d'archives israéliennes, en 2013, Ariella Azoulay déclare : « Je veux contribuer à créer les conditions du pardon, je ne veux pas être dans le camp du bourreau[10] ».

Prise de position[modifier | modifier le code]

En 2021, elle critique le rapport de Benjamin Stora sur le colonialisme français en Algérie qui occulte selon elle les crimes coloniaux français, en particulier la « destruction des cultures juives au Maghreb » qui a suivi le décret Crémieux, qui sépare les juifs algériens de leurs compatriotes non-juifs, en leur imposant la nationalité française[11]. De plus, elle reproche à Benjamin Stora une présentation simplificatrice des communautés juives du Maghreb, qui en efface la diversité[12],[13]. Ariella Azoulay affirme que le rapport de Benjamin Stora perpétue un récit historique colonialiste, et remet en question le choix de Benjamin Stora en tant que chercheur juif sélectionné par le gouvernement. Elle plaide en faveur d'un examen plus complet des crimes coloniaux et de leurs conséquences sur le long terme, contestant le récit présenté dans le rapport officiel[14].

Carrière[modifier | modifier le code]

Ariella Azoulay enseigne à l'Université Bar-Ilan en Israël qui refuse de la titulariser pour des raisons politiques selon Haaretz[15] et +972 Magazine[16] ; elle devient professeure à l'Université Brown aux États-Unis.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Civil Imagination : The Political Ontology of Photography, London, Verso, 2012 , compte rendu en français en ligne (traduit de l'hébreu par Louise Bethlehem ; traduit en italien par K. McManus en 2018, aux éd. Posmedia Books sous le titre : Civil imagination. Ontologia politica della fotografia) ; compte rendu en anglais en ligne J.J. Barnes.
  • Ariella Azoulay et Adi Ophir, The One State Condition: Occupation and Democracy in Israel/Palestine, Stanford University Press, 2012, traduit de l'hébreu (2008) ; compte rendu en français en ligne ; titre de l'ouvrage original traduit en français : Ce régime qui n’en est pas un : occupation et démocratie entre la mer et la rivière, Tel-Aviv, Resling, 2008.
  • From Palestine to Israel: A Photographic Record of Destruction and State Formation, 1947-1950, (traduit de l'hébreu ; Pluto Press, 2011).
  • Death’s Showcase : The Power of Image in Contemporary Democracy, Cambridge and London, MIT Press, 2001 - Gagnante du prix "The Affinity Award, ICP.
  • The Civil Contract of Photography (2007), traduit de l'hébreu par Rela Mazali et Ruvik Danieli, Zone Books, 2008.
  • «Un état d'urgence civile», Artforum, décembre 2011, traduction en français en ligne
  • Azoulay Ariella, Ophir Adi, « Le sionisme, l'État d'Israël et le régime israélien », Cités, 2011/3 (no 47-48), p. 67-82. DOI : 10.3917/cite.047.0067. URL : https://www.cairn.info/revue-cites-2011-3-page-67.htm
  • «Constituting Violence 1947-1950, A visual genealogy of a regime», 2009[17]
  • Aïm Deüelle Lüski and Horizontal Photography, Leuven University Press and Cornell University Press, 2013, (Aïm Deüelle Lüski est un photographe israélien) [.https://hal.univ-rennes2.fr/hal-01630110/document compte rendu en français en ligne]
  • Ariella Azoulay et Adi Ophir, Mauvais jours, entre désastre et utopie (en hébreu), Resling, 2002.
  • Once Upon A Time: Photography following Walter Benjamin (Bar Ilan University Press, 2006, en hébreu).

Filmographie[modifier | modifier le code]

Ariella Azoulay a réalisé plusieurs films documentaires :

  • Civil Alliances, Palestine, 47-48 (2012) (« Le pacte civil, Palestine, 47-48 »)
  • I Also Dwell Among Your Own People: Conversations with Azmi Bishara (2004)
  • The Food Chain (2004) («La chaîne alimentaire»)
  • Sign from Heaven « Un signe du ciel », 1999 ; ce film donne à voir trois épisodes récents de violence : l'assassinat de Yitzhak Rabin par Igal Amir, le meurtre de Yehuda par sa femme Carmela Bouhbout ; et l'élimination de Yahia Ayache dit «l'ingénieur» par les forces de sécurité israéliennes[18]

Exposition[modifier | modifier le code]

Commissaire d'exposition[modifier | modifier le code]

Ariella Azoulay a organisé comme curatrice plusieurs expositions centrées sur des images d'archives :

  • "Act of State 1967-2007" ( Centre Pompidou, 2016),
  • Enough! The Natural Violence of the New World Order (F/Stop festival, Leipzig, 2016), *"The Natural History of Rape," Pembroke Hall, Brown University,

“*The Body Politic” [in Really Useful Knowledge, curated by What, How & for Whom / WHW], Reina Sofia, Madrid;

Sur le travail d'Ariella Azoulay[modifier | modifier le code]

  • Anna Gormley, Allan Stuart, « Re-imagining Human Rights Photography : Ariella Azoulay’s Intervention», dans Reporting Human Rights, Conflicts, and Peacebuilding, 2019, p. 203-220, résumé en ligne
  • Andy Fisher (Golsdmiths College, University of London) et Daniel Rubinstein (University of the Arts London), «Out of photography … Interview with Ariella Azoulay». Philosophy of Photography, 2(1), p. 3-20. ISSN 2040-3682 accès réservé en ligne.
  • Elle Flanders (réalisatrice et photographe)[19], «The Right to Share the Public Archive: A Conversation about Ariella Azoulay's Different Ways to Say No to Deportation», Fillip, issue no 16, printemps 2012, p. 17-19, lire en ligne
  • «John Tagg (Binghamton University) and Ariella Azoulay in Conversation», Crossing the Boundaries XXI 2013: Dis/Place, Binghamton University, 2013

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. « centrepompidou.fr/cpv/resource… »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?).
  2. Susan Slyomovics, How to Accept German Reparations, p. 219-220, lire en ligne
  3. « Ariella Azoulay - Centre Photographie Genève », sur centrephotogeneve.ch (consulté le ).
  4. (en) « Azoulay, Ariella », sur brown.edu (consulté le ).
  5. « Pour A. Azoulay, dans le contexte israélien de l'après-1948, caractérisé par la relégation sociale, économique et culturelle des juifs originaires des pays à majorité musulmane (juifs appelés mizrahi), relégation imposée par la minorité des Juifs d'Europe de l'Est, la réticence de son père à se définir comme algérien fut interprétée par elle comme un mensonge en vue d'effacer une identité maghrébine qu'il ne pouvait pas assumer, à la différence de sa fille » (« For Ariella Azoulay, in the post-1948 Israeli context characterized by social, economic and cultural erasures of the large Jewish community from Muslim-majority countries (known as Mizrahim), by the minority of Jews of Eastern European origin, her father's reticence was interpreted as a lie to efface a Maghrebi, hence a Mizrahi identity that her father could not and did not embrace as his daughter does »), Susan Slyomovics, How to Accept German Reparations, p. 222, lire en ligne
  6. Stijn De Cauwer (2021)« Ariella Aïsha Azoulay and Georges DidiHuberman: the persistence of lost worlds », Journal of Aesthetics & Culture, 13:1, 1994179, DOI: 10.1080/20004214.2021.1994179, [https://doi.org/10.1080/20004214.2021.1994179 lire en ligne]
  7. a et b Cécile Poblon, https://www.lebbb.org/website_datas/item267/pj/BBB_FEUILLE_DE_SALLE_ARIELLA_AZOULAY.pdf
  8. Darlene Trew Crist, «Ariella Azoulay», https://news.brown.edu/new-faculty/humanities/ariella-azoulay
  9. Laurence Jay Silberstein, Postzionism: A Reader, Rutgers University Press, New Brunswick, New Jersey, London, p. 10, lire en ligne
  10. La dure naissance d'Israël avec Ariella Azoulay, ouest-france.fr, 20/12/2013
  11. Sonia Dayan-Herzbrun, « Azoulay, Thiong'o : Les langues, comme des bijoux », sur En attendant Nadeau, (consulté le )
  12. Lior B. Sternfeld et Menashe Anzi, « Guerre des mémoires en Israël sur les juifs arabes et iraniens », sur Orient XXI, (consulté le )
  13. (en) Brigitte Stepanov, « The Implicated Subject: Colonial Atrocity, Harki Identity, and an Ontology of the In-Between », Violence: An International Journal,‎ (ISSN 2633-0024 et 2633-0032, DOI 10.1177/26330024231215818, lire en ligne, consulté le )
  14. (en-US) Ariella Aïsha Azoulay, « Algerian Jews Have Not Forgotten France’s Colonial Crimes » [« Les Juifs algériens n’ont pas oublié les crimes coloniaux de la France »], sur Boston Review (consulté le )
  15. « Bar-Ilan Lecturer Reportedly Denied Tenure Due to Views », septembre 2010, https://www.haaretz.com/1.5116803
  16. https://972mag.com/occupation-nakba-interview-with-ariella-azoulay-adi-ophir/14465/
  17. (en) « (no title) », sur israel-academia-monitor.com (consulté le ).
  18. a et b https://www.lebbb.org/website_datas/item267/pj/BBB_FEUILLE_DE_SALLE_ARIELLA_AZOULAY.pdf
  19. (en) « Elle flanders », sur academia.edu (consulté le ).

Liens externes[modifier | modifier le code]