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Bahouan (Cameroun)

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Signification du nom Bahouan[modifier | modifier le code]

Bahouan est formé de deux syllabes : Ba=Pa qui signifie « les gens de » (dans la prononciation en Bahouan on dirait Pa et Weing) Weing, mot dérivant lui-même de Weingtche c'est-à-dire « éviter ». Bahouan signifierait alors « les gens qui évitent », c'est-à-dire ceux qui fuient les problèmes.

Situation géographique[modifier | modifier le code]

Le groupement Bahouan, situé dans le département des Hauts-Plateaux (à 22 kilomètres de Bafoussam sur l’axe Bafoussam-Douala), fait partie des 4 groupements que compte l’arrondissement de Bamendjou[1].

Bahouan
Administration
Pays Drapeau du Cameroun Cameroun
Région Ouest
Département Hauts-Plateaux
Démographie
Population 5 495 hab. (2005[2])
Géographie
Coordonnées 5° 21′ 57″ nord, 10° 22′ 21″ est
Altitude 1 548 m
Localisation
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Bahouan
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Bahouan
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Bahouan

Bahouan ( Lá' Wɛŋ ou guɔŋ á Wɛŋ en ghomala') est une localité d'environ 15 km2 située dans la région de l'Ouest du Cameroun, dans le département des Hauts-Plateaux. Les villages limitrophes sont Bandjoun, Bamendjou, Bameka et Baham. La langue parlée est le ghomala'[3],[4]. Le groupement Bahouan est divisé en sept quartiers : Hiala, Mohiè, Mbou,Deuntcha, Tchave, Djeugo et Togheu. Le chef supérieur Bahouan s'appelle Sa majesté Ndassi Nenkam Faustin Jean.

Bref historique[modifier | modifier le code]

Le groupement a été fondé entre le XVIe et le XVIIe siècle par Kenmogne, le cadet des jumeaux Kammegne et Fohom dit Fohomtchueng, fondateurs respectifs de Baham et de Bayangam. Tous trois venaient de Ndop après un transit à Bagam dans les Bamboutos.

Le groupement en est aujourd’hui à sa 17e dynastie.

Aperçu de la dynastie Bahouan[modifier | modifier le code]

La dynastie Nguegouncheu se présente ainsi :

  1. Feu kenmogne : Fils de Nguegouncheu, cadet des jumeaux. Fondateur de Bahouan.
  2. Feu Nguegouncheu II : Fils de Kenmogne.
  3. Feu Nkekake nzu: Fils de Nuegouncheu II;
  4. Feu Nkentchekwa Fils de Nkekake nzu. Créateur de la danse Mwouop.
  5. Feu Kamtseu fils de Nkentchekwa.
  6. Feu Feuto Tchouegom: fils de  Kamtseu, Grand organisateur des cadres socioculturels.
  7. Feu Tseuchie : Fils de Feuto Tchouegom.
  8. Feu Nwochie, Fils de Tseuchie : Fondateur de la danse Metchieh
  9. Feu Nechie, Fils de Nwochie; fondateur des célèbres sociétés secrètes Kemjieh et Kouossi.
  10. Feu Nessom: Fils de Nechie, grand agriculteur et éleveur fit de Bahouan une zone de grande production de pomme de terre,
  11. Feu Feuwouo Tchouegom Fils de Nessom, Pacifiste et ouvert au dialogue.
  12. Feu Kouokam Guedem: Fils de Feuwouo Tchouegom. Forte personnalité, habile manœuvrier, il fut le créateur de la danse sécrète Kom-Kouossi, il meurt en 1904.
  13. Feu Feutseu: Fils de Kouokam Guedem; son règne fut éphémère (1904-1905).
  14. Feu Simo: Fils de Kouokam Guedem ; (1905-1910) son règne fut assombri par l’affaire Mabou-Nguemkam qui faillit faire raser Bahouan par les Allemands, d’où l’exode massif des Bahouan.
  15. Feu Feugaing Djuikam: fils de Kouokam Guedem ; (1910-mars 1959). Homme de grande finesse, pacifiste et amoureux de la Culture; Créateur de la société secrète Kwemteng. La razzia sur les chefferies de l’ouest en février 1958 n’a pas épargné celle de Bahouan. Après un mois de répit, celle-ci eut un coup dur de plus, la nuit du 4 au 5 avril 1958, tout a été incendié et saccagé. Ce qui fragilisa davantage le moral, voir la santé du vieux sage. Le règne  de Feu Feugaing dure 49 ans, il disparut en mars 1959 à 104 ans.
  16. Feu Nenkam Fofongue Fréderic : fils de Feugaing Djuikam ; (mars 1959-décembre 1988) ; homme moderne d’une rare intelligence. Il a su concilier tradition et modernisme. premier maire de la commune de Bamendjou ; il mit sur pied une organisation civile apolitique et à but non lucratif sous le nom de Regerba (Réunion Générale des Ressortissants Bahouan)  pour moderniser le village ; le foyer culturel Bahouan, le centre de santé intégré, l’électricité, la transformation des pistes en routes praticables en témoignent cet élan de solidarité. Il créa la société sécrète Komenûh.
  17. Feu Ndassi Nenkam Faustin Jean : Fils de Nenkam Fofongue Fréderic ; ingénieur agronome, il a la responsabilité de conduire Bahouan à l’émergence. Né le 16 mars 1962 ; il règne depuis mars 1989 ; pionnier de l’aménagement des bas-fonds et de l’agriculture toute saison, Il est au centre d’un vaste chantier de réformes donc voici quelques exemples : le quadrillage des activités du Redeba (Réunion pour le Développement de Bahouan) ; la coordination de l'action des élites en les orientant vers le développement économique, social et culturel de Bahouan, la promotion de  la paix et la concorde.

Histoire de Mahbou Nguemkam[modifier | modifier le code]

S'il est une histoire qui anime de temps à autre les débats publics dans le groupement Bahouan, c'est assurément celle de Mahbou Nguemkam.Personnage historique ou fabrication imaginaire ? Dans l’histoire du peuple Bahouan, aucune figure n’a autant fasciné les esprits, bousculé les certitudes et chamboulé  les conventions. D’aucuns vont même jusqu’à affirmer que tant que l'histoire de cet homme ne sera pas élucidée et des rituels réalisés en son nom, une malédiction certaine continuera pèsera comme une épée de Damoclès sur la tête de Bahouan. Mais qui était cet homme ? Évocation romancée de l'écrivain Sop Joseph, de regrettée mémoire, actualisée par Eugène FONSSI[5].[modifier | modifier le code]

Il était une fois un homme nommé MAHBOU GUEMKAM, GUEMKAM par sa mère, car il n’était pas un notable, et de père NZUDIE NZUGUEM.  Jeune et robuste, il avait encore à se forger un nom dans cette société fortement hiérarchisée de ses ancêtres où une personne sans titre est considérée comme une femme, fût-il un homme attesté. L’ascension sociale pour un jeune relevait quelque peu du rêve et de l’utopie, à moins que ce ne soit par héritage ou succession, après la mort du père, ou celle d’un membre de la famille maternelle qui n’a pas fait de garçon, probabilité chaque fois faible dans ce milieu où les hommes  sont par instinct polygames et réputés prolifiques.

Il faillait travailler dur, très dur et notre homme n’était pas personne à se croiser les bras. Il avait déjà tout tenté pour se faire une place au soleil du village en portant aussi un chapeau en public et en marchant en route sans fuir les hommes masqués des sociétés secrètes comme un vulgaire enfant. Il avait travaillé dur chez un grand notable comme berger en vue de son parrainage, mais en vain. Il avait fendu du bois, attaché les barrières, abattu les arbres, cassé les pierres pour augmenter les surfaces cultivables, transporté comme un âne les marchandises de ses maîtres aux marchés, etc. A vrai dire, il avait tout tenté pour prouver que quelque chose pendait bien dans son bila et qu’il n’était pas homme à reculer, même face à un lion ; cependant le sort en décidait toujours autrement. Le plus honnête de ses maîtres, au lieu de la nourriture et de la protection qu’ils lui assuraient, lui donna en mariage sa fille, pour apaiser son cœur et lui faire oublier des années d’esclavage. Mais personne n’avait jamais osé le tenir par la main pour franchir la porte du palais et lui faire goûter le plaisir et le bonheur d’être homme parmi les hommes.

Le désespoir le gagnait déjà quand soudain les Allemands débarquèrent en Pays Bamiléké et ouvrirent leur comptoir pour le commerce des esclaves. MAHBOU GUEMKAM y vit une mèche, un coup de pouce du destin pour une considération sociale. La colonisation allemande devait bousculer des valeurs et restructurer la société. Il priait nuit et jour pour souhaiter le chaos et la chute de l’ancien régime responsable de son malheur ; les royaumes Bamiléké infiltrés par les nouveaux maîtres devaient subir de profonds bouleversements. De nouvelles classes devaient naître.

Sans se faire prier, l’ancien forçat rêvait de mettre ses énergies au service des nouveaux maîtres dont les échos nourrissaient toutes les conversations et les radios-trottoirs qui colportaient que les Allemands volaient les jeunes filles pour en faire leurs femmes et les jeunes hommes pour laver les assiettes. Certaines sources plus portées à décourager les jeunes filles qui rêvaient déjà d’un lit de Blanc et menaçaient leurs fiançailles diffusaient que lorsqu’ils arrivaient quelque part, ils arrêtaient, femmes, hommes et enfants, les attachaient à un câble pour aller faire le djock-messi.

Un soir, un témoin oculaire s’est même présenté au village, venant du marché Bandjoun où ils avaient passé une journée tragique et mémorable, une journée de pleurs et de sang. Il était 10 heures quand une Jeep s’imposa à la foule compacte et grouillante. Les gardes en sortirent armés de fusils. Il s’en suivit une débandade générale des villageois, un indescriptible remue-ménage d’êtres jaloux de leur liberté. Deux femmes dans leur fuite avortèrent ; quelques hommes en sautant les barrières reçurent des pieux dans leurs entrailles ; des enfants moururent piétinés. En quelques secondes, le lieu naguère bruyant de monde, devint désert, désolation, parfait hétéroclite d’objets abandonnés, de comptoirs branlant de vivres, de corbeilles à poules tranquilles comme au passage d’un épervier, de sol pavé de grains et de tubercules écrasés, d’animaux surpris de recouvrer subitement leur indépendance et haletant comme foudroyés par un ouragan.

Au milieu de ce désordre, les gardes patrouillèrent en maîtres des lieux enjambant les cadavres, riant du pittoresque spectacle, collectant sans marchander tout ce qui pouvait flatter leur papille et faire apprécier par leurs patrons les bienfaits de la colonisation : coqs aux ergots solides et crochus, gros œufs ovales et bien frais, boucs aux cornes recourbées, pommes de terre lisses et gonflées de vitamines.

Mais les histoires racontées sont d’un autre ordre ; on les a beau écouter et partager, à côté rodent toujours quelques incertitude et doute. Ce témoignage était loin de détrôner les rêves et les ambitions des uns et des autres. Tant qu’on ne met pas soi-même son doigt au feu, on est loin d’imaginer la douleur qu’éprouve un brûlé. Ainsi, sourd à tous les bruits du journal-racontage, le jeune homme s’enfermait dans ses idées, décidé à marcher vers son destin, quoi qu’il arrive.

Le contact allemand

Le premier contact du village Bahouan avec les Allemands se fit de façon simple et le plus ordinairement possible. Ce jour-là, on vit venir par la piste emménagées par les villageois une grande maison roulante, incommodée par l’étroitesse de la voie, laquelle s’immobilisa au milieu du marché. Elle faisait beaucoup de bruits comme pour chasser la tranquillité et la paix, attirer l’attention des villageois, et la curiosité légendaire des badauds de tout acabit.

Deux Blancs en descendirent devant et cinq gardes Bambara derrière sautèrent au sol déséquilibrés par une pratique mal assimilée qui nécessite des os tendres et une vigueur martiale exempte de tout rhumatisme. L’un d’entre eux dans cet exercice tomba sur les fesses, les jambes en l’air. Les gens se mirent à faire du bruit en frappant sur tout ce qui peut résonner. Il se leva, aidé par les autres noirs comme lui noirs comme charbon. Il tituba, simulant mal sa honte, laissant involontairement les autres découvrir leurs gencives noir-cirées aux dents jaunies dans un rire étouffé. Les deux Blancs se regardèrent, le visage sévère et baragouinèrent des mots, très gênés et rougis. Le plus grand au long nez se dirigea vers la case sacrée, se tourna, sortit son long tuyau et la fusilla longuement de jets d’urines comme un sapeur pompier débordé par un incendie en furie, laissant deviner qu’ils avaient fait un long voyage et qu’un malheur, une tragédie en gestation attendait le village. Certains qui avaient déjà ouï parler de ces négriers fuyaient le marché, alors que quelques filles rôdaient autour d’eux en bombant leur poitrine et en montrant leurs dents. Passé l’orage du ridicule, les deux Blancs firent le tour du marché, forçant des sourires d’amitié vers tout le monde, usés par des regards avides de renseignements et en proie à l’angoisse. Une foule indécise et sympathique se formait peu à peu autour des gardes, alors que les enfants taquinaient la voiture, la touchaient et la caressaient des mains comme pour s’en approprier. Après force gestes, on comprit que ces curieux étrangers voulaient voir le roi, car après avoir exterminé les jeunes des autres villages, ils étaient à la quête d’une nouvelle réserve. Les gardes du roi les conduisirent au palais. Le chef de bande, celui-là même qui avait pissé comme un bœuf, remit un cadeau au roi, une médaille à l’effigie d’un empereur allemand, en signe d’amitié. Il fit aussi comprendre qu’il pourrait de temps en temps recruter les gens du village comme soldats, travailleurs ou stagiaires en Allemagne. Le roi fit battre le tam-tam d’appel pour marquer son approbation et apaiser les inquiétudes suscitées par l’insolite visite. La première tentative de recrutement se fit ce jour même au marché. L’opération ne fut pas facile, à cause du grand handicap de communication, car ni les Blancs, ni les Bambara ne parlaient la langue des indigènes. Mais par hasard, MAHBOU GUEMKAM eut à passer par-là. Sans se faire prier, il se fit enrôler par les nouveaux maîtres et rejoignit ainsi la meute inhumaine des négriers.

L’émissaire

Quand la voiture redémarra, les Bambara aidèrent leur nouveau camarade à monter dans la banquette arrière. Mais au cours de ce premier exercice, son bila s’accrocha  à un fer et se déchira. Il n’eut sa nudité sauve que grâce à la profondeur de la carlingue du car. Les écureuils de la forêt sacrée d’à côté clapirent de honte et de surprise, sautant de branche en branche en remuant leur queue touffue de désapprobation. Les gens se mirent à crier et radio-trottoir diffusait déjà au village qu’il était mort… Après un long voyage, ils arrivèrent dans la nuit à Dschang, quartier général des Allemands. MAHBOU GUEMKAM suivit les autres Noirs dans la partie indigène qui servait de camp de concentration. Pendant la première semaine, ses cours de stagiaire étaient très pratiques ; on lui apprenait les choses en allemand en les touchant, en faisant des gestes. A la deuxième semaine, comme il connaissait les choses comme habit, laver, fer, repasser, il devient le blanchisseur d’un des Blancs, ce qui lui donna accès à une alphabétisation rapide et utilitaire. Au cours des tournées que les Allemands firent avec lui, il passa rapidement pour courroie entre eux et les indigènes de la région, devenant un brave interprète de fortune. Eclaireur à souhait, il allait de contrée en contrée, livrer une chasse sournoise à l’homme, fier dans son uniforme kaki, valorisé dans son amour-propre, imposant et véhément avec son chapeau et son bâton de commandement. Juché sur son cheval, tout le royaume était à ses pieds, cheminant confusément, aux petits galops vers de nouveaux lendemains.

Petit à petit, la traite se généralisa et le commandant fit un calendrier de passage de ses hommes dans chaque village pour prendre les hommes destinés aux travaux forcés. Le jeune prodige, MAHBOU GUEMKAM fut nommé émissaire auprès des rois. Il alla de palais en palais annoncer le message du commandant blanc qui consistait à indiquer le jour de la collecte des esclaves et le nombre qu’on devait apprêter. Il séjournait de temps en temps dans son village quand sa mission était non loin de là et était admiré par certains villageois comme un modèle de réussite jouant par le fait même la publicité pour de nouvelles recrues qui malheureusement moins fortunées que lui prenaient d’autres voies, la voie de la traite et des travaux forcés. Comme ces hommes ne revenaient plus ni ne donnaient des nouvelles, le bruit du commerce humain circulait, agaçait les esprits, donnant de l’insomnie aux sceptiques et du désespoir aux rêveurs. Toujours est-il que c’est dans cette atmosphère de tension et de guerre froide qu’il arrive pour une fois encore en émissaire auprès du roi de son village, dominant son cheval et remettant en question la hiérarchie traditionnelle, déclassant le vieux hamac du pouvoir. Il devint la cible de toutes les jalousies et de tous les commérages des rencontres secrètes car tout ce qui est bon, beau doit appartenir au roi.

Un bien curieux destin

Ce jour de sa mission était un jour interdit au village où n’importe qui ne va pas au palais, à moins d’être d’une certaine société secrète. Avait-il perdu la notion du calendrier du village ? Ou voulait-il défier les traditions étant devenu presque Blanc ? Ou encore voulait-il narguer les ancêtres dans leur culture ? Comme possédé, MAHBOU GUEMKAM, fils de Bahouan, en ce jour interdit à Bahouan, marcha sur le Palais à cheval, son casque dressé, son uniforme au vent et son bâton de commandement sondant l’inconnu. Quand les membres de la société secrète en réunion le virent, l’un d’entre eux s’exclama :

-N’est-ce pas là le fils de NZUDIE NZUGUEM que voici ? Y a-t-il deux soleils au ciel ? Y a-t-il deux lunes au ciel ? Le père regarda le fils qui descendait dans la cour du palais, il mit sa main en visière pour bien le dévisager. Rien à faire ! C’était bien lui, son fils, le fils de Guemkam. Le scandale venait d’être commis et le déshonneur consommé, car selon les coutumes, un enfant ne peut pas voir son père dans la société secrète et dans l’histoire du village, personne n’a jamais enfreint… cette loi. L’assemblée cria de protestations, le père se leva, donna un coup de pied pour renverser son tabouret et partit très fâché. Les autres membres poursuivirent le délinquant fils, l’arrêtèrent, le tuèrent, soulevèrent une case sur pilotis et l’enterrèrent. Ils burent le cadi pour garder tout secret,  se donnèrent les mains et frappèrent le sol des pieds en signe de malédiction en prononçant ces mots « Que tous ceux qui dans ce village suivent le Blanc soient comme MAHBOU GUEMKAM ». Selon certaines indiscrétions cette version de la tragédie a été arrangée de façon à culpabiliser la victime qui faisant ombrage au roi et aux nobles, avait été enlevée une nuit et tuée par les gardes rapprochées ou serviteurs qui après leur forfait, vinrent faire allégeance au maître en disant :

-         Majesté, nous avons déjà fait oublier le prétentieux-là ;

-         Qu’est-ce à dire s’exclama le roi ?

-         C’est-à-dire que nous avons zigouillé MAHBOU GUEMKAM.

-         Qui vous a ordonné cela, lança le roi en pleurant en prophète de l’avenir. On dit qu’en rendant le dernier soupir il avait murmuré : - puisque tel est mon sort, permettez-moi de parler dans cette assemblée de nobles où je n’ai pas le droit. Que vous me laissiez en vie ou que vous me tuiez, vous allez beaucoup souffrir.

Quelle que soit la version, toujours est-il qu’après sa mort, le village Bahouan a été secoué par une spirale d’évènements tragiques.

La mission punitive des Allemands

Les jours se sont passés et même des semaines sans que MAHBOU GUEMKAM rende compte de sa mission à sa base. Dans le village, tous ceux qui n’étaient pas de la société secrète croyaient qu’il était à Dschang ; alors qu’à Dschang, compte tenu de sa loyauté et de sa fidélité par le passé, on le devinait certainement dans de mauvais draps d’une pernicieuse maladie ou de la révolte subite d’une population lestée tragiquement, lestée et debout pour refaire sa dignité.

Après plusieurs battues dans les villages situés sur l’itinéraire du pauvre émissaire, on arriva dans son village natal, le village noir qui couvait la tragédie. Les soldats allemands, accompagnés de leur chien patrouillèrent pendant deux jours, molestant et torturant les gens sans leur arracher la moindre information.

L’expert allemand, le maître du molosse, fatigué, intrigué décida de donner un dernier assaut en fouillant les concessions et les maisons une à une. Soudain, le chien aboya et l’attira vers une maison posée sur les troncs d’arbres. Il renifla fort, se glissa en dessous et se mit à creuser la terre. Les membres de la société secrète se regardèrent discrètement. Le Blanc ordonna qu’on déposât la maison à l’écart. La foule la ceintura, entonna un chant de guerre pour ramasser et unir, et leurs forces, et leur courage, et hop mit la cachette à l’écart. Une tête se dressa au soleil comme posée au sol, les yeux éteints, le regard baissé et la langue allongée, comme pour réclamer vengeance et condamner la dureté des hommes.

A la vue de ce spectacle, les soldats demandèrent aux indigènes de se coucher face au sol. Ils matraquèrent les pauvres villageois, incendièrent les maisons, saccagèrent le village et emmenèrent prisonniers ceux que pouvaient accepter le vide et le poids de leurs voitures. C’était un deuil général dans le village, le deuil des femmes pleurant leurs maris et leurs enfants pleurant leurs parents. Tous ceux qui racontent cette horreur aux enfants observent toujours une pause, sursautent et portent la main entre les jambes avant d’ajouter : « imaginer qu’on leur marchait sur le sexe. » Le village se dépeupla, car il ne restait plus que des vieillards, quelques femmes et de très jeunes enfants qui ne savaient où aller. La peur d’autres expéditions était obsessionnelle. Tous les jours, sur la place du marché, c’étaient les tragiques scènes de vieilles femmes nues couvertes de cendres dont les volumineuses mamelles en quête de leur élasticité tombaient jusqu’aux cuisses. C’était leur façon à elles de protester, de conjurer la guerre et de péter aux allemands en touchant la conscience des dieux.

L’exil du roi

Devant la gravité de la situation que connaissait le village, le roi Simo, craignant pour sa vie s’enfuit avec certaines femmes et des notables. Le village était devenu orphelin. Le commentaire allait bon train ; des groupes de commérages se formaient à chaque coin de piste. Pour certains, il était fait prisonnier à Dschang ; pour d’autres, il était mort en prison. Le calme revenait petit à petit dans le village et les fuyards sortaient déjà de leur retraite pour penser à une nouvelle vie. Certains prisonniers libérés regagnaient aussi leurs concessions, devenus impuissants ; ils apportaient des nouvelles plus ou moins bonnes de certaines personnes dont on avait organisé le deuil. Cependant, le trône était toujours vacant et le roi SIMO recherché par les Allemands. Cette vacance fertilisait l’imagination et les ambitions des unes et des autres. Un jour parvint au village la rumeur de sa mort et les villageois décidèrent de procéder à son remplacement, mais sans organiser le deuil. La famille royale était divisée pour le choix du nouveau roi. Certains princes dont le chef de file était SOUOP TAGUEUKO se prononcèrent en faveur de SOUOP TEINTCHUENG dont ils rasèrent la tête et voulurent le mettre au trône. Mais c’est l’adjoint au roi SIMO, FOFEUGUENG qui grâce au roi Bandjoun accéda au trône. Le roi est mort, vive le roi ?

L’espoir renait peu à peu ; les reines et les princes peuvent de nouveau rire, mais pour combien de temps ? Pas pour longtemps en tout cas. Après quelques années de règne, les bruits parviennent que son frère titulaire du trône n’est pas mort en exil et qu’il se prépare à venir conquérir son trône. Les ennemis du nouveau monarque relayés par les faux prophètes disent que l’ancien jouit des faveurs du puissant roi Bamoun dont il est le protégé. Les nuits deviennent cauchemardesques. Les tensions montent de toutes parts. Les devins entrent en scène, scrutant le ciel, interrogent les araignées, se contredisent et s’embrouillent. Un grand malaise s’installe au village et dans le palais : certains notables se révoltent, des reines se soulèvent ; bref le désordre fait le lit à la précarité du royaume.

Bahouan amputé

Face à cette agitation et à la menace de perdre le pouvoir, le roi FOFEUGUENG doit élaborer une stratégie politique et de défense pour contrer les éventuels assauts de son frère. Il entre en pourparlers avec les rois des villages voisins et signe des accords d’assistance en cas de guerre et cela moyennant une partie de son territoire. Ainsi certaines parties du village vont passer à Bandjoun, Baham, et Bamendjou.

Seul Bameka promit son aide généreusement, car le roi FOFEUGUENG était son petit-fils, sa maman descendant de la chefferie Bameka. Bahouan sort donc très réduit de ces alliances et heureusement ou malheureusement, ne fut organisée aucune expédition punitive contre le roi, qui dans un sursaut d’orgueil voulait réclamer ses terres, mais en vain, ayant appris que son frère devenu roi d’un puissant et riche royaume aux terres très fertiles, n’avait rien à gagner en retournant pour une hypothétique vengeance. Il fait la guerre contre Baham, Bamendjou et surtout Bandjoun. La confrontation avec ce dernier très peuplé était marquée de ruse et de diverses péripéties faites de bravoure minoritaire.

Le spectre du roi Simo

Le village petit à petit, au fil des années s’était remis des cendres de guerre et la tragédie de MAHBOU GUEMKAM convertie et transformée en légende. A l’écouter, beaucoup de jeunes gens pensaient braver des scènes épiques de la tradition orale ou passer un test de courage et d’ultime initiation à la vie d’adulte, car cela se faisait avec détails, grossissements, intentions d’effrayer et de faire pleurer. Chaque chroniqueur y allait de sa verve, de ses repères et de son sens unique de créativité.

Mais dans cette atmosphère de paix, de calme apparent et de construction du village, le roi FOFEUGUENG, toujours inquiet ne dormait que d’un œil, troublé par le spectre de son frère en exil dont les devins annonçaient l’imminente arrivée sur des chars de lions. MAHBOU GUEMKAM a été tué. Les allemands  sont partis, mais où est le roi SIMO ? Aujourd’hui encore, après deux siècles environ, son ombre plane sur le village, hante les esprits et fait rêver.                                                                                                                         

Interprétation du calendrier lunaire[modifier | modifier le code]

  • Janvier = Kemghé (labour pour petites surfaces ou Feu de brousse pour les grandes surfaces)
  • Février = Sohgwueng (récolte du pois (guehng) et formation des sillons)
  • Mars = Nzetse (semence généralisée)
  • Avril = Nze-biyeing (semence des arachides et mise des animaux en enclos)
  • Mai = Souné (sarclage, désherbage)
  • Juin = Zuh-gouh (semence de la patate et récolte des légumes (Feuilles de haricot ou koki)
  • Juillet = Fefe (fine pluie en continu toute la journée)
  • Août = Tchouaghefe (récolte du maïs)
  • Septembre = Khem-biyeing (récolte des arachides)
  • Octobre = Zum-koh (culture du haricot)
  • Novembre = Chuengzù (effet de première chaleur et désherbage des champs)
  • Décembre = Feh-gouh (grande balade du joli oiseau migrateur à la queue en forme de faucille, au plumage colorié rouge.)

UN GROUPEMENT AUX POTENTIALITÉS NATURELLES ET HUMAINES ÉNORMES, par Dieudonné Feugaing, Géographe avec le concours d'Eugène FONSSI

Qu'il soit Américain, Allemand, Japonais ou simplement Camerounais, un touriste partant de la capitale économique du Cameroun, à savoir Douala, à la découverte du Groupement Bahouan, a plus d'une chance de réussir son opération sans anicroche. Dès qu'il franchit la frontière entre la Région du Littoral et celle de l'Ouest par la Nationale N° 2 Douala-Bafoussam, il aborde le Haut-Nkam, premier département de la Région de l'Ouest du côté sud, puis le département des Hauts-Plateaux dont le chef lieu est Baham. A une vingtaine de kilomètres de Bafoussam, il découvre, à hauteur d'une toute petite intersection fraichement bitumée (Carrefour Ka'ago), une plaque qui porte l'inscription "Chefferie Bahouan". Prenant l'embranchement par la gauche, quelque 3,5 kilomètrres de route le conduisent au cœur de Bahouan, petit groupement de 15 km² de superficie dont l'histoire, d'après la légende, aurait été ponctuée par d'importantes migrations ayant conduit la population des plaines Tikar au site actuel en passant par le Noun et Galim.

Bahouan fait partie des cinq groupements qui composent l'Arrondissement de Bamendjou, département des Hauts-Plateaux, province de l'Ouest. Limité au nord par Bameka, au sud par Baham, à l'Ouest par Bamendjou et à l'est par Bandjoun, il se situe entre 5°20' et 2°22' de latitude nord, 10°18' et 10°24' de longitude est. Il compte cinq grands quartiers (Mbou, Mohié, Hiala, Djeugo, Deuntcha) dont les caractéristiques extérieures varient en fonction du dynamisme de la population.

S'il est reconnu que la géographie de Bahouan tout comme son histoire s'intègrent globalement dans celles des Hauts-Plateaux de l'Ouest Cameroun, il n'en demeure pas moins qu'une étude approfondie de ce cadre de vie pourrait laisser apparaître quelques spécificités. Lesquelles ? Allons à la découverte du milieu naturel et des hommes et les surprises seront à la hauteur de nos attentes.

 1 – Un milieu naturel exigu mais propice à l'épanouissement

Considérant le milieu naturel comme la combinaison des phénomènes physiques qui interfèrent en un lieu donné, nous ne saurions l'évoquer sans nous référer au relief, au climat, au sol, à la végétation, à l'hydrographie et à la faune.

1.1   – Un relief plus ou moins accidenté

Du point de vue topographique, le relief de Bahouan s'intègre dans l'ensemble topographique des Hauts-Plateaux de l'Ouest. Au-delà de quelques zones plates ou légèrement inclinées, l'on note l'existence de quelques collines à faible pente : colline de Djeugo, Mohié et Tchavé. Les versants se rencontrent dans des lignes de fond ou talwegs, où coulent des cours d'eau à faible débit.

A chacun de ces éléments de relief correspond un mode spécifique de mise en valeur.

1.2 – Un climat subéquatorial

Sur le plan climatique, le climat de Bahouan est inséparable de celui des Hauts-Plateaux de l'Ouest. Il est qualifié de climat subéquatorial car la localité subit alternativement les influences équatoriales et tropicales. Ceci se traduit par :

-         une atmosphère sèche et plus fraîche ;

-         des températures modérées ;

-         des précipitations abondantes ;

-         l'existence de deux saisons  une longue saison des pluies qui s'étend de la mi-mars à la mi-novembre ; une courte saison sèche qui commence à la mi-novembre et se termine à la mi-mars et correspond en fait à un fléchissement des précipitations.

De ces diverses caractéristiques découlent d'importants atouts pour l'agriculture et le tourisme.

1.2   – Des sols profonds

Sur le plan pédologique, les sols argileux latéritiques sont typiques du Sud Cameroun. A Bahouan, ils résultent de la décomposition de la roche-mère sous l'effet de l'abondance des pluies et des températures relativement élevées. Les sols élaborés de cette double influence sont particulièrement profonds et exercent un puissant attrait sur les paysans qui recherchent des terres disponibles pour assurer leur survie. Toutefois, en fonction de l'altitude, on distingue : les sols hydromorphes des bas-fonds qui présentent un intérêt particulier pour les palmiers-raphias, les sols fins dans les zones de faible pente propices à la culture des tubercules et des céréales, les sols caillouteux (secteur de Mbeng) dans les zones de fortes pentes impropres à l'agriculture.

1.3   – Une végétation modifiée par l'homme

Du point de vue de la végétation, la forêt primitive a été détruite à Bahouan en raison de la poussée démographique, par des défrichements opérés par l'homme à des fins agricoles. Toutefois, l'arbre n'a pas disparu du paysage. Au-delà des forêts sacrées conservées pour des cérémonies rituelles (Veu Lem, Fa'am, Deungo…) le reboisement effectué dans certains secteurs porte sur les arbres fruitiers (avocatiers, kolatiers, goyaviers, etc.), les espèces sélectionnées pour leur importance (eucalyptus, etc.) et les haies vives des paysages de bocage. Dans tous les cas, quand ce n'est pas la savane herbeuse (grassfield) qui prend le pas, la prééminence revient aux cultures vivrières.

1.4   – Une hydrographie tributaire des conditions topographiques et climatiques

Sur le plan hydrographique, les bas-fonds où se rencontrent les versants sont drainés par quelques cours d'eau qui les serpentent de part et d'autre et se jettent dans la principale rivière du village dont seules certaines spécificités sont fortement connotées suivant les quartiers : "Togheu", "Vava", "Tobù", "Tse-Tueu", etc… Tous les cours d'eau appartiennent au bassin de l'Atlantique et ont un régime hydrologique camerounien, avec une période de hautes eaux en saison des pluies et une des basses eaux en saison sèche. Leur importance en milieu Bahouan reste considérable.

  1.5 – Une faune quelque peu négligeable

Enfin, la faune est loin d'être importante en raison de l'absence d'une véritable forêt dense. Autrefois riche, elle est aujourd'hui essentiellement composée de rats, d'écureuils et, en certains endroits encore, de singes dont quelques colonies s'attaquent aux cultures. Quelques espèces domestiques viennent compléter la liste : porcs, chèvres, moutons, lapins, volailles, cochons d'Inde, etc.

 Ainsi se présente le milieu naturel Bahouan, un milieu riche, diversifié et aux implications économiques indéniables, un milieu porteur d'espoir pour une population dynamique et ouverte au progrès.

  2 – Une population au dynamisme affirmé

Pour des raisons de commodité, l'analyse de la population originaire du groupement Bahouan ne saurait se passer de l'étude des paramètres aussi variés que sont la mise en place des hommes, la situation démographique et la structure de la population.

 2.1 – Une mise en place progressive

 L'histoire de l'implantation de la population Bahouan au sud-ouest de Bafoussam (site actuel) est inséparable de celle des Bamiléké, composante essentielle du groupe dit semi-bantou ou bantoïde. Selon la légende, il s'agit d'une histoire mouvementée, ponctuée de nombreuses migrations dont le point de départ semble être la Région de Ndop dans l'actuel pays Tikar (dans le Haut Mbam). Devant la cruauté du Roi Tikar, ceux qui allaient constituer le peuple Bahouan s'enfuient vers le Pays Bamoun (Gham) où leur chef de famille, Nguegouncheu sera assassiné, laissant une femme (enceinte) et deux jumeaux sans véritables protecteurs. Après un transit à Galim (Bagam) et à Bamendjio (Mbouda) alimenté par un conflit entre les trois frères, le cadet des jumeaux, Kengmogne, fonde le Groupement Bahouan vers les XVIe – XVIIe siècles, tandis que les deux jumeaux passent pour être les fondateurs respectifs de Baham et de Bayangam.

Sous la pression des guerres tribales et du harcèlement des villages voisins, la Chefferie Bahouan, d'abord implantée à Mohié, sera transférée ensuite à Deuntcha, puis au Centre du Village. Au fil du temps, la population, au départ homogène, se diversifie.

2.2 – Un groupement soumis à une forte pression démographique

Le Groupement Bahouan est une terre d'intégration. Ses habitants viennent d'horizons divers, mais constituent des Bamiléké pour l'essentiel. Numériquement, les autochtones sont de loin le groupe le plus important. Quant aux immigrants, ils viennent des villages voisins (Bamendjou, Bameka, Bandjoun, Baham) et même des localités lointaines. Leur séjour à Bahouan s'explique soit par des besoins de mariage, soit par des raisons d'ordre professionnel (enseignants, infirmiers, moniteurs agricoles, etc…). Leur entente avec les populations locales ne souffre d'aucune déconvenue.

Sur le plan démographique, Bahouan, groupement de très faible superficie (15 km² seulement), a une population qui se situe au-dessus de l'optimum. En l'absence d'un véritable recensement démographique, il serait hasardeux d'avancer un chiffre. Cependant en fonction des documents, l'estimation de la population de ce village varie parfois du simple au double : 8 000- 10 000 – 15 000 habitants selon le cas. Ce qui paraît clair tout au moins, c'est que Bahouan avec plus de 400 hbts au km², a l'une des densités les plus élevées de la Province de l'Ouest et même du Cameroun. Plusieurs facteurs expliquent cet état de choses :

-         les conflits antérieurs qui ont permis aux villages voisins de s'étendre au détriment du groupement Bahouan ;

-         la fertilité du sol et la douceur du climat qui sont attrayantes pour les agriculteurs et propices à l'habitat humain ;

-         l'excédent des naissances sur les décès. De cette situation troublante découlent de nombreux problèmes fonciers.

Quand ce ne sont pas les besoins de scolarisation, d'affectation ou alors la volonté d'améliorer les conditions d'existence par un emploi plus rémunérateur qui la motivent, c'est la pression démographique qui incite une bonne partie de la population à aller voir ailleurs. De ce fait, l'émigration la conduit vers des villages voisins ou éloignés, les villes (exode rural) et parfois vers des pays étrangers (migrations internationales).

2.3 – Une structure socio-démographique déséquilibrée

La structure de la population Bahouan peut être étudiée à travers une pyramide des âges en parasol. Elle permet de mettre en évidence la répartition par âge, par sexe et par profession.

 2.3.1 – Un sex-ratio déséquilibré

S'agissant du sex-ratio qui est la proportion d'un sexe par rapport à l'autre, il est largement favorable aux femmes. Ainsi, on peut noter dans le groupement Bahouan : près de 57 % de femmes contre près de 45 % d'hommes comme dans les autres régions sous-développées. Là où le bât blesse, c'est que la scolarisation reste limitée chez les femmes au-delà du CM2 à cause, soit de l'insuffisance des moyens, soit des mariages précoces, soit de la ségrégation qui fait privilégier les jeunes garçons au détriment des jeunes filles. A l'heure où la mondialisation incite à l'excellence, ce type de préjugé devrait cesser de faire école à Bahouan. L'implantation d'un CES dans la localité ne corrige qu'en partie ce manquement.

 2.3.2 – Une population très jeune

Du point de vue de la répartition par sexe, les jeunes viennent largement en tête (près de 57 % de personnes avec moins de 20 ans), suivis des adultes (près de 37 % de 20 à 55 ans) et enfin des vieillards (près de 6 % avec plus de 55 ans). De cette répartition découlent, comme dans de nombreuses autres localités des Hauts-Plateaux de l'Ouest, d'importants problèmes socio-économiques. Les estimations chiffrées peuvent cependant être modifiées en raison de l'exode rural, des ravages causés par le VIH/SIDA qui pourrait toucher les jeunes et de nombreux adultes, l'accélération des décès dans la tranche d'âge des vieillards.

           2.3.3 – Une forte entité socio-professionnelle

Du point de vue de la répartition par profession, la population Bahouan intervient de façon inégale dans les trois principaux secteurs d'activités économiques ci-après :

-         Le secteur primaire. Il regroupe les activités fournissant les produits bruts. Ici, l'agriculture est prédominante chez les Bahouan. Ils la pratiquent dans et en dehors de leur village (villages voisins, Noun, Bamboutos, Moungo…), avec une forte participation de la gent féminine dans les travaux de défrichement, les semailles, le sarclage et les récoltes.

-         Le secteur secondaire. Il regroupe les activités liées à la transformation des produits bruts en produits finis. Ici, les populations basées à Bahouan excellent dans l'artisanat (soudure métallique et couture très en vue exceptionnellement en dehors de Bahouan, menuiserie, maçonnerie, fabrication des objets d'art à partir du bois, du fer, des peaux d'animaux et des tiges de bambou, tissage des nattes ou "meta" pour la fabrication des sacs, artisanat alimentaire…) ; par contre, celles touchées par la dispora s'épanouissent dans l'industrie. Les principaux industriels, implantés essentiellement à Bafoussam et à Douala, font surtout dans la fabrication d'objets en plastique (STPC), d'insecticides et dans l'industrie alimentaire.

-         Le secteur tertiaire. Il regroupe les activités en rapport avec les services. Nombreux sont ceux qui interviennent dans l'hôtellerie (Hôtel des Palmiers et Hôtel des Roses à Douala), le secteur bancaire et financier (COMECI aujourd'hui en liquidation), les transports, la Fonction Publique (enseignement, santé, agriculture, urbanisme, P.T.T….), l'appui au développement (CIPCRE, IRESCO, APCRE), la politique, les œuvres musicales et surtout le commerce (COGENI, BUTRACO, SOREPCO, SOCOPRAL, TAELI, PAGECAM, Ets NZIKO, GLOBAL VOYAGES, GLOBAL OIL…). Les établissements commerciaux, implantés pour la plupart à Bafoussam, à Yaoundé et ses environs et surtout à Douala, font dans la quincaillerie, l'habillement, l'imprimerie, la mercerie, la librairie, les pièces automobiles, la parfumerie, la literie, l'alimentation, la discothèque, les ustensiles de cuisine… Dans cette branche d'activité, on distingue les petits commerçants qui se contentent des installations sommaires, les commerçants moyens et les gros commerçants. Ces derniers qui font la vente en gros et en semi-gros, gèrent souvent d'importants super-marchés et font parfois dans l'import-export. L'informel occupe une place de choix.

Au terme de notre tour d'horizon sur le milieu naturel et la population du groupement Bahouan, force est de reconnaître qu'ils constituent un important atout pour le développement de notre localité. Ils sont indispensables pour la promotion des divers secteurs d'activités économiques : agriculture, artisanat, transport, tourisme… Jusqu'à nos jours, ces ressources ont pu, à l'effet d'en tirer le meilleur avantage possible, être valorisées sous la houlette des particuliers, des ONG et de nombreuses associations à l'instar du Cercle International pour la Promotion de la Création (CIPCRE), du Cercle d'Etudes et de Promotion des Copains Bahouan (CEPCOBA), du Cercle de Réflexion et d'Action pour le Développement de Bahouan (CRADEB), de l'Amicale de l'Elite Intellectuelle Bahouan (AEIB), de l'Amicale des Femmes des Elites Intellectuelles Bahouan (AFEIB), de la Réunion pour le Développement de Bahouan (REDEBA), du Groupe de Réflexion et d'Action pour le Développement de Bahouan (GRADEBA), etc. Cependant, il reste encore beaucoup d'efforts à faire, eu égard à l'importance des défis à relever, notamment la réalisation des projets économiques et sociaux, la lutte contre la sorcellerie, l'insécurité, la prostitution et le grand banditisme, la mise en œuvre des mesures en faveur de la protection de l'environnement, de l'enfant et de la femme à l'effet de créer à Bahouan les conditions d'un développement durable.

Personnalités liées à Bahouan[modifier | modifier le code]

  • Albert Dzongang, homme politique
  • Pierre Nenkam, homme politique
  • Rév Dr Jean-Blaise Kenmogne, leader de la société civile
  • Isidore Tamwo, artiste musicien
  • Rigobert Tamwa, acteur de cinéma
  • Djemmo Lucas, opérateur économique
  • Fokwo Paul, homme politique
  • Dieudonné Feugaing, Historien géographe
  • Eugène FONSSI, Pédagogue et consultant en éducation
  • Emmanuel Wonkam, Pédagogue
  • Gilbert Soffo; Ingénieur Agronome et Consultant
  • André Marie Kuatche, Adjoint au Maire de Bamendjou
  • Grégoire TAMO, Economiste
  • Pr Ambroise Wonkam, Généticien
  • Honoré Simo, Opérateur économique
  • Prince Aimé, artiste musicien
  • Claude DG, artiste musicien
  • Kamghouo Jean Marc, Ingénieur de Génie Civil
  • Tamne Pius, artiste musicien
  • Pr Emmanuel Tchumtchoua, historien
  • Dr Waffeu Touko Patrick, Universitaire et peintre
  • Abbé Venant Feussi, Homme de Dieu
  • FOWO Bernard Joseph, Anthropologue médical
  • Nzu Mainto, Freelance Consultant
  • Tagne Elie, le faiseur des milliardaires

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Histoire du groupement Bahouan Bamendjou, sur le site Communes et villes unies du Cameroun (CVUC)]
  2. Troisième recensement général de la population et de l'habitat (3e RGPH, 2005), Bureau central des recensements et des études de population du Cameroun (BUCREP), 2005.
  3. « Bahouan », sur certotola (consulté le ).
  4. « Cameroun », sur wikiedit.org (consulté le ).
  5. Hamdi Mlika, « Présentation du N° 14 / Avril - Mai - Juin 2015 », المخاطبات, no 14,‎ , p. 9–11 (ISSN 1737-6432, DOI 10.12816/0020568, lire en ligne, consulté le )

Annexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Joseph Sop, Fonction ludique et éducative de la tradition orale bamiléké : exemple de Bahouan,1977, 71 p. (mémoire),Université de Yaoundé,
  • Eugène FONSSI, Chronique de la vie quotidienne: La scène, les coulisses et les histoires, Presses de l’Université Evangélique du Cameroun, Mbouo/Bandjoun, 2016, 235 p.
  • Thèse présentée et soutenue publiquement le 21 mars 2008 devant la faculté de Médecine, de Pharmacie et d’Odonto-Stomatologie par M. Domche Nkoumga Tadomdjoug Xavier.
  • (Dé)nominations et constructions identitaires au Cameroun par Jean-Benoît Tsofack
  • Rois et sculpteurs de l'Ouest Cameroun: la panthère et la mygale Par Louis Perrois, Jean-Paul Notué
  • J.C. BARBIER Sociologue de l'Orstom - centre de Yaoundé (Cameroun)
  • L'homme d'outre-mer Collection publiée par le Conseil supérieur des Recherches sociologiques outre-mer et par l'Office de la Recherche Scientifique et Technique Outre-Mer Nouvelle série, n° 4 Claude Tardits Contribution à l'étude des populations Bamiléké DE L'Ouest Cameroun Préface du Gouverneur Hubert Deschamps, secrétaire général du Conseil, Directeur des Sciences humaines à l'Orstom
  • Toukam D., Histoire et anthropologie du peuple bamiléké, Paris, éd. Harmattan
  • Jacques Champaud, Villes et campagnes du Cameroun de l'ouest
  • Cadre de gestion environnementale et sociale du Projet Compétitivité des Filières de Croissance (PCFC) Version Finale - Mars 2010/page 41
  • Air France Magazine, n°180 avril 2012/ photo Sa majesté Ndassi Nenkam Faustin Jean

Liens externes[modifier | modifier le code]