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Institut de sexologie

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Institut de sexologie
illustration de Institut de sexologie

Création Voir et modifier les données sur Wikidata
Disparition Voir et modifier les données sur Wikidata
Fondateurs Magnus HirschfeldVoir et modifier les données sur Wikidata
Directeurs Magnus HirschfeldVoir et modifier les données sur Wikidata

L'Institut de sexologie (Institut für Sexualwissenschaft) de Magnus Hirschfeld est un organisme privé à Berlin, ouvert le et détruit en mai 1933 dans le cadre des autodafés et pillages de 1933 par les nazis.

Historique[modifier | modifier le code]

En créant cet institut, Hirschfeld, étant médecin et réformateur de sexologie engagé depuis la fin du XIXe siècle, a réalisé un rêve personnel : contribuer à la mise en place de l'institutionnalisation de la sexologie malgré les voix critiques (notamment du côté de la science) et assurer une protection juridique ainsi qu'une sécurité financière à la « promotion de la recherche scientifique de l'ensemble de la vie sexuelle et l'information sur ce territoire. »

Plaque commémorative dans le parc Tiergarten à Berlin.

L'institut était révolutionnaire et un lieu unique dans ses fonctions, jusqu'après la Seconde Guerre mondiale. Ce que les nazis n'ont pas brûlé le sur la place de l'Opéra (aujourd'hui Bebelplatz) à Berlin et ce qui n'a pas été vendu en par le bureau de contribution de Berlin a été perdu lors du bombardement de Berlin à la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Le 10 mai 1933, les nazis brûlent des œuvres d'auteurs juifs, la bibliothèque de l'Institut de sexologie et d'autres œuvres qui étaient considérées « non-allemandes ».

Bâtiment et salles[modifier | modifier le code]

L'institut se situait au croisement du 3, Beethovenstraße et 10, In den Zelten; le bâtiment était originellement la "Villa Joachim", construite en 1871/1872 pour le professeur de musique Joseph Joachim; de 1910 à 1919, il fut transformé en "Palais de Ville" par le Prince von Hatzfeld. Hirschfeld acheta le bâtiment au prix de 400 000 marks. En 1921, il fut agrandi: le restaurant voisin Luisenzelt est transformé en salle de conférence nommée d'après le biologiste Ernst Haeckel[1].

Le rez-de-chaussée contenait un musée (dirigé par Karl Giese), les chambres privées de Magnus Hirschfeld et Karl Giese, des cuisines et salles de repas, des chambres pour les visiteurs, et un petit amphithéâtre. A l'étage se trouvait le matériel médical (rayons X, électrolyse, etc.). Au grenier se trouvaient des chambres où étaient détenus des criminels en attente de procès, pour qui l'Institut était une alternative à la détention provisoire. Dans le bâtiment d'â côté se trouvait la salle de conférence Ernst Haeckel[2].

A l'institut se trouvait aussi un "Mur de l'Androgynie" qui exposait des photographies de personnes intersexes, travesties ou homosexuelles; par exemple Willi Pape, la comtesse Dina Alma de Paradeda, et Annie Jones, la "femme à barbe de Barnum"[3].

L'Institut fut pillé par les étudiants nazis le 6 mai 1933; aujourd'hui, le bâtiment n'existe plus. Une plaque commémorative, inaugurée près de l'ancien site de l'Institut Hirschfeld le , 75 ans après sa création, est évocatrice du lieu.

Personnel connu[modifier | modifier le code]

Magnus Hirschfeld fut directeur de l'Institut de sa fondation jusqu'à sa destruction. Un des cofondateurs de l'Institut, le psychologue Arthur Kronfeld, y travailla jusqu'en 1926[4]. Karl Giese était le directeur du musée de l'Institut[5].

Bernard Schapiro était endocrinologue et dermatologue à l'Institut; Felix Abraham dirigeait le département de la recherche sexo-légale à partir de la fin des années 1920; Karl Besser officiait comme graphologue[6]. Ludwig Levy-Lenz y était chirurgien[7].

L'Institut employait des femmes transgenres, parce qu'il était presque impossible pour elles de trouver du travail ailleurs; ainsi, Toni Ebel et Dora Richter furent employées comme personnel de maison, et Charlotte Charlaque comme interprète et standardiste; toutes trois furent opérées sous l'égide de l'Institut.

Adelheid Schulz fut domestique de 1928 à 1933[8].

Structure et organisation[modifier | modifier le code]

L'institut, censé être un lieu de recherche scientifique, ne l'est jamais devenu malgré les idées de Magnus Hirschfeld. C'était surtout une institution ambulatoire qui servait à donner des conseils en cas de problèmes sexuels et à faire des examens médicaux. Étant une archive de collecte, de tri et de traitement, ainsi qu'un musée de la démonstration de publications de sexologues et autres documents pertinents de toutes sortes, il a été un pôle d'attraction dans le Berlin des années folles.

Il servait de lieu de formation de médecins, de lieu de conférence, même si Hirschfeld et Arthur Kronfeld sont intervenus dans de nombreuses universités et autres établissements d'enseignement de Berlin et au-delà. Il a joué un rôle non négligeable dans l'organisation d'activités novatrices en sexologie. 

Recherche et consultations[modifier | modifier le code]

Chaque semaine, Hirschfeld organisait des "soirées questionnaire" au cours desquelles le public pouvait se présenter à l'amphithéâtre Ernst Haeckel et remplir le questionnaire psycho-biologique ("Frageboged"), qui contenait 137 questions portant sur l'hérédité, l'enfance et la jeunesse, les caractéristiques physiques, les caractéristiques psychiques, et les tendances sexuelles. Plusieurs milliers de ces questionnaires renseignés étaient détenus à l'institut[9],[10].

Hirschfeld organisait également des consultations à destination des couples hétérosexuels, qui pouvaient venir et poser des questions à propos du mariage, de l'éducation des enfants, de l'amour, du sexe et de l'avortement. De tels services furent loués par Margaret Sanger, fondatrice du Planning Familial[10].

Pionniers dans la question de la transidentité[modifier | modifier le code]

Magnus Hirschfeld a forgé le terme de transsexualité[11], identifiant la catégorie médicale que son collègue Harry Benjamin développera plus tard aux États-Unis. Il y avait des personnes transgenres parmi le personnel de l'institut ainsi que parmi les clients, comme Charlotte Charlaque (interprète et standardiste), Toni Ebel et Dora Richter (cuisinière)[12]. Des interventions chirurgicales et endocrinologiques étaient proposées, incluant les premières interventions de chirurgie de réattribution sexuelle à partir de 1930.

Hirschfeld a également collaboré avec la police de Berlin, créant un « laissez-passer de travesti » pour les personnes désirant porter des vêtements associés à un autre genre que celui attribué à leur naissance, afin d'éviter qu'elles soient systématiquement arrêtées ou soupçonnées de prostitution[13],[14].

Références[modifier | modifier le code]

  1. « Chronologie der Institutsgebäude », sur www.magnus-hirschfeld.de (consulté le )
  2. « On the Clinics and Bars of Weimar Berlin », sur www.trickymothernature.com (consulté le )
  3. « On the Clinics and Bars of Weimar Berlin », sur www.trickymothernature.com (consulté le )
  4. « Arthur Kronfeld (1886-1941) », sur www.magnus-hirschfeld.de (consulté le )
  5. (de) Raimund Wolfert, Charlotte Charlaque: Transfrau, Laienschauspielerin, "Königin der Brooklyn Heights Promenade", Hentrich & Hentrich, (ISBN 978-3-95565-475-7, OCLC on1286534661, lire en ligne), p. 35
  6. (de) Baumgardt, Manfred, « Kaffeerunde mit Adelheid Schulz », Schwule Geschichte, vol. 7,‎ , p. 4-16
  7. « Neu entdeckt: Ludwig Levy-Lenz‘ Grab in München », sur www.magnus-hirschfeld.de (consulté le )
  8. « Adelheid Schulz, Hauswirtschafterin », sur www.magnus-hirschfeld.de (consulté le )
  9. Pierre Najac, « L'Institut de la Science Sexuelle à Berlin », dans Vénus et Mercure, Paris,
  10. a et b « On the Clinics and Bars of Weimar Berlin », sur www.trickymothernature.com (consulté le )
  11. (en) Ekins R., King D., Pioneers of Transgendering : The Popular Sexology of David O. Cauldwell., (lire en ligne).
  12. « On the Clinics and Bars of Weimar Berlin », sur www.trickymothernature.com (consulté le )
  13. (en) Beachy, Robert, Gay Berlin : Birthplace of a Modern Identity, Knopf Doubleday Publishing Group, , 352 p. (ISBN 978-0-307-47313-4 et 0-307-47313-9)
  14. (en) « Between World Wars, Gay Culture Flourished In Berlin », sur npr.org, .

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Bibliographie[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]